Le combat spirituel – Notre Dame du Laus, juillet 2023

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LE COMBAT SPIRITUEL

Par Sœur Ruth, sœur Missionnaire du Christ Rédempteur (Nancy)

Enseignement donné à Notre-Dame du Laus, au festival FP, en Juillet 2023.

Nous vous en proposons deux versions. 

L’une est plus synthétique, retranscrite par François Reinberger à partir de ses notes, et l’autre plus longue, retranscrite par Marie-Hélène Martin à partir d’un audio, qui en a gardé le style oral.

Toutes deux sont membres de notre petite équipe de rédaction du site FP. 

Version brève, par Françoise Reinberger. 

Sœur Ruth
Sœur Ruth

Le combat spirituel est un bien pour nous-mêmes et pour les personnes vers qui le Seigneur nous envoie.

Nous avons été crées par Dieu à son image et à sa ressemblance, mais nous sommes blessés.

Plus je comprends mes manques et mes limites, plus je peux les déposer au Seigneur, et grandir : je laisse Dieu être Dieu dans ma vie, et je recherche Dieu et Sa face ; nous sommes coopérateurs de sa grâce, et s’il y a un vide au fond de nous, ce besoin d’être aimé, c’est pour que nous le recherchions, que nous le désirions.

Et Lui vient nous recréer, nous ajuster, nous unifier, nous simplifier.

Le combat spirituel fait partie de ce cheminement, je suis invité à porter ma croix, pour que nous soyons tous un seul corps, le corps du Christ, et donner notre vie pour la gloire de Dieu.

Le Père nous aime à la folie, et il y a vraiment une ingéniosité de Dieu pour s’adapter à notre psychologie, à ce que l’on est, chacun.

C’est notre choix d’être disciple, de mettre Dieu à la première place, de nous abandonner à Lui ; et Dieu nous ramène sur son cœur si nous nous éloignons de Lui. Nous entrons dans le combat spirituel par des actes de foi, dans la confiance, dans l’espérance du salut, dans la paix, la charité ; il nous renouvelle pour que nous nous donnions à Lui.

Je formule ma prière : Seigneur, je choisis de rester dans la paix ce jour, quoiqu’il arrive ; et Dieu me garde dans la paix. Je choisis de ne pas me faire voler ma paix, mon espérance et je pose des actes de foi et d’abandon. Même dans l’épreuve, cette prière est entendue et nous dispose dans des attitudes profondes d’abandon pour être ajusté à la volonté de Dieu. C’est aussi faire mémoire des promesses de Dieu dans ma vie.

C’est par une décision et un choix que j’entre dans le combat spirituel, c’est Dieu qui combat en moi, mais il a besoin de moi pour que son projet prenne corps.

Le combat spirituel peut provoquer la peur,

mais c’est un mensonge, je suis enfant de Dieu, Il n’y a pas de tension entre le bien et le mal comme le laisse croire le monde : Dieu est Dieu et il est tout puissant, Satan est une créature.

Le combat spirituel nous est donné pour la croissance ;

si on entre dans la peur, on se fige, on ne combat plus ; si la peur vient, je me réfugie dans les bras du Père et j’accueille le regard du Père sur ma vie.

Il y a le combat par rapport à nous-mêmes, à l’image que nous avons de nous-mêmes ;

il y a besoin de faire du nettoyage, c’est l’enjeu de la délivrance dans nos vies ; nous nous mettons toujours sous le regard de Dieu, nous lui déposons notre liberté et nous lui demandons de nous montrer ce qui nous empêche d’être libre, (par exemple telle parole, tel jugement que j’ai pu avoir sur une personne…je lui dépose), et Lui fait le travail.

Saint Thomas d’Aquin dit qu’il y a 3 domaines dans le combat spirituel, 3 entrées : notre cœur, le monde et le tentateur

Notre cœur

Saint Jean de la croix parle d’une purification ; il y a besoin de couper des liens puis d’une purification : c’est changer ses habitudes spirituelles ; par exemple, si j’ai des découragements, je demander à Dieu de me donner de l’audace ; on peut ainsi travailler sur les vertus, pour être plus enraciné en Dieu.

Nous avons besoin de beaucoup d’humour, de patience et de douceur, de bienveillance envers nous-mêmes pour ne pas nous décourager ; ainsi, si j’ai des moments de découragement, je peux faire l’expérience de la puissance d’amour du Seigneur, et quelque chose va changer dans mon cœur parce que je me laisse aimer par Dieu ; nous pouvons vivre des épreuves difficiles de déchirement, d’humiliation, mais Dieu vient nous relever.

Il est fondamental de se laisser aimer par le Père et l’expérience que l’on a besoin de vivre le combat spirituel est le lieu du plus gros combat dans notre vie ; Dieu fait son œuvre, et cela nous dépasse, l’essentiel est de rester ajusté au regard du Père.

Le monde

L’influence de la société qui nous entoure peut-être très forte (les mensonges sur notre nature humaine, le syncrétisme dans l’église…) il importe d’être des chrétiens courageux pour dire que le salut vient du Christ, une fois pour toutes, que tout nous est donné.

L’expérience de l’effusion de l’Esprit Saint est une grande chance car à ce jour, il y a une grande détresse spirituelle et Dieu nous envoie vers les autres pour encourager, consoler. Il y a de plus en plus besoin de chrétiens affermis ; le réveil arrive, prenons notre place et soyons attentifs aux personnes qui nous entourent, rendons grâce de l’espérance qui nous habite.

Préservons notre cœur pour ne pas nous laisser entrainer dans la confusion : je sais qui je suis, je sais que je suis sous le regard du Père, et je sais pourquoi j’ai donné ma vie à Dieu, et je demeure dans la paix et l’amour du Père.

Prière : J’accueille le regard du Père sur moi, Il sourit, se réjouit de moi – si ton cœur te condamne, Ton Père est plus grand que ton cœur– Il voit tout ce qu’il va déployer dans ma vie, du bien que je fais, la charité que je porte autour de moi

« Père, je te rends grâce pour ta sagesse, je viens à toi comme un petit enfant, je te bénis pour toutes les fois où tu viens me serrer sur ton cœur, me libérer, tu combats pour moi ; je ne me reconnais qu’en toi, c’est ton regard sur ma vie qui compte ; je veux accueillir à tout moment ton regard aimant sur moi et je rejette ce mensonge que c’est par mes mérites, que c’est à la force du poignet que je peux gagner ton amour ; je sais que ton bonheur, c’est de m’aider dans ce combat et je veux te laisser combattre pour moi ».

Le diable et ses tactiques

Il fait beaucoup de bruit et peut induire la peur, il est l’accusateur de nos frères, le tentateur ; renonçons à la peur et remettons-la à Dieu.

Il peut agir sur nos pensées, nos sensations ; il est séducteur, menteur et père du mensonge, il sait faire naitre les soupçons, ; il peut nous décourager. Prions alors jusqu’à ce que quelque chose se passe (le temps de Dieu n’est pas le nôtre).

Dans nos groupes de prière, il peut y avoir des combats spirituels :

  • dans le domaine matériel (la sono qui ne fonctionne pas…) car il veut nous faire sortir de la prière. Démarrer à l’heure exacte, même si c’est sans sono ou sans musique et se mettre en présence de Dieu.
  • la communion fraternelle peut être rompue par des tensions, des clivages, on ne se comprend plus… nous avons besoin de comprendre qu’il n’y a pas de malveillance entre nous, même si l’autre me blesse ; posons un regard de bienveillance sur chacun et accueillons-nous les uns les autres sous le regard de Dieu ; c’est une décision de notre cœur de croire en la bienveillance du frère, sans faire semblant ; là est l’enjeu de notre groupe de prière.
  • préparons notre cœur sur la route ; et pour commencer la prière, entrons dans la présence de Dieu, allons à l’essentiel, ouvrons nos cœurs au Seigneur.
  • nous avons besoin de connaitre nos limites, nos fragilités, de connaitre les lieux où « je me fais avoir » par l’ennemi ; on se demande pardon et on fait le premier pas en demandant pardon, et ainsi on désarme l’ennemi.
  • utilisons les prières de protection : invoquons le sang de Jésus, sur nous, nos familles, nos groupes de prière et mettons-nous sous le manteau de Marie (cf. le rituel PDG pour les prières de protection, délivrance et guérison)
  • contemplons Jésus à Gethsémani « mon âme est triste à mourir, demeurez ici et veillez avec moi » ; communions à la souffrance de Jésus et faisons nôtres les prières de Jésus.
  • proclamons la parole de Dieu à haute voix, mémorisons-la, proclamons-la ; la parole à haute voix est agissante et puissante.
  • appelons la bénédiction de Dieu en particulier si nous sommes en difficulté dans une situation ou avec une personne, et rendons grâce à Dieu ; je suis appelé à être charitable avec moi-même pour aimer les autres ; j’accueille la bénédiction de Dieu sur ma vie et je bénis à mon tour les personnes, les lieux. La bénédiction vient changer mes habitudes, je vais arrêter de juger les personnes, de médire.
  • nous avons besoin de nous faire aider, de partager nos lieux de combat spirituel, ne restons pas seul, ayons l’humilité des enfants dans la foi : j’ai besoin de mon Père, de mes frères et sœurs (je peux voir un prêtre, demander la prière des frères…)
  • Sollicitons notre ange gardien qui nous donne des motions intérieures.

Le combat spirituel porte des fruits quand on donne sa vie au Seigneur ;

c’est une joie de savoir que Dieu bénit, qu’Il va nous envoyer plus loin ; préservons notre communion avec Dieu, c’est mon trésor ; même dans les pires tribulations, la paix de Dieu demeure en moi ; laissons-Le être notre Père.

Repérons ce qui fait échos en nous dans cet enseignement, repérons nos lieux de découragement, et repérons nos failles ou lieux de fragilités dans le combat spirituel. 

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Version longue, transcription audio de Marie-Hélène Martin.

Le combat spirituel : cela peut faire peur, on y va un peu en traînant des pieds, et moi je voudrais qu’on puisse le voir dans nos vies comme une bonne nouvelle. Il fait partie de la vie chrétienne habituelle, il nous faut réaliser à quel point, dans sa miséricorde, sa sagesse, son amour, le Seigneur nous permet d’entrer dans ce combat. C’est un bien pour notre vie, il est bon pour nous-mêmes et pour la vie de toutes les personnes vers qui le Seigneur nous envoie. C’est un sujet dont on ne parle pas assez dans l’Église, il faut qu’on l’enseigne autour de nous.

Nous avons été créés par Dieu à son image et à sa ressemblance, mais nous sommes blessés. On le sait ; comme dit saint Paul, tout le bien qu’on voudrait faire, on n’arrive pas à le faire, par contre tout le mal qu’on ne voudrait pas faire, ça… Des fois je dis au Seigneur : mais pourquoi n’as-tu pas permis que je ferme ma bouche, que je retienne ma langue ? Il y a des moments dans notre quotidien où on se dit : voilà, eh bien là, je me suis planté dans ma réaction, ma façon de faire. Mais aujourd’hui on va comprendre que c’est tant mieux : plus je suis au clair dans mes manques de vérité, de charité, plus je peux les déposer et laisser Dieu être Dieu dans nos vies.

Donc, nous avons été créés par amour, et de jour en jour cela nous permet de rechercher Dieu, de rechercher sa Face, de l’accueillir, de le désirer, de le laisser être Dieu dans notre cœur, dans notre vie ; car nous sommes vraiment coopérateurs de la grâce. Dieu nous a créés avec une sorte de vide au fond de nous, pour que nous le recherchions. Le combat spirituel est là, il nous permet de nous réajuster. Ce vide, ce besoin d’être aimé, fait que nous allons le chercher ; et le Seigneur vient, parce que nous le cherchons, parce que nous le désirons. Il vient lui-même faire cette œuvre de recréation dans nos cœurs, dans nos vies, dans nos âmes.

Et il vient faire toute chose nouvelle, nous ajuster, nous simplifier, nous unifier. Parce que nous entrons pleinement dans la vie chrétienne qui nous est proposée, parce que nous la vivons jusqu’au bout, parce que nous désirons la vivre jusqu’au bout et pas seulement à moitié. Et le combat spirituel fait partie de ce chemin. Si je veux que Dieu unifie mon cœur, me simplifie, pour que je l’entende de plus en plus, que je sois de plus en plus capable de lui, je dois choisir d’entrer dans le combat spirituel. Je dois accepter de porter ma croix, c’est-à-dire accepter que nous sommes tous un seul corps, le corps du Christ, et qu’à sa suite nous sommes invités à donner nos vies pour la gloire de Dieu, pour la plus grande gloire de Dieu.

C’est important de réaliser que le Père nous aime, et nous aime à la folie, et que cet amour du Père pour nous, c’est un truc de dingue ! Personne ne peut être aussi fin psychologue que le Seigneur. Vous imaginez tout ce qu’il doit déployer pour chacun d’entre nous ? Si on prenait la vie de juste une personne, son parcours de foi[1], pour réaliser l’ingéniosité de Dieu, la façon dont il s’adapte à notre rythme, à notre psychologie. Il va utiliser des signes qu’on va comprendre, avec notre voisin il va parler autrement, il s’adapte vraiment à ce que l’on est. Et quand on choisit la vie chrétienne, quand on choisit  d’être vraiment disciple, pas être seulement des chrétiens qui sont en règle avec le Seigneur, en allant à la messe le dimanche, mais de vraiment mettre de Dieu à la première place dans notre vie, qu’on se confie en lui, qu’on lui donne notre vie, qu’on s’abandonne en lui, quand on pose cet acte de foi, Dieu ne cesse de venir, il est là, tout proche de nous. Parfois il se comporte un peu comme un père, qui voit son fils ou sa fille s’éloigner, qui le (la) prend par le col et lui dit « reviens, là, je t’explique ! ». On est surpris parfois nous-mêmes de voir dans quelles choses on peut se laisser embarquer, mais le Seigneur, il sait comment faire pour aller nous récupérer et nous ramener sur son cœur. Et il passe son temps à le faire. Pour laisser Dieu être père comme ça dans notre vie, nous avons besoin de poser des actes de foi clairs ; nous avons besoin de demander à Dieu de garder nos cœurs dans la joie de croire, dans la confiance en son amour pour nous, dans l’espérance du salut qui nous est donné par le Christ qui est mort sur la croix ; et nos cœurs doivent être conservés dans cette paix, cette espérance, dans la charité qu’il renouvelle jour après jour pour que nous puissions nous donner.

On peut écrire nos prières de foi qui nous feront entrer dans le combat spirituel. Que chacun puisse formuler sa prière : Seigneur, pour aujourd’hui, je choisis de garder mon cœur dans la paix ; je choisis de demeurer, quoi qu’il arrive dans ma journée, dans la paix ; je fais ce choix : après, on est tous pareils, il suffit d’un petit bouchon, d’une petite contrariété pour qu’on commence à s’agacer… Mais voilà, poser cet acte de foi de demander à Dieu de nous garder dans sa paix, ça porte un fruit incroyable dans notre cœur, dans notre vie, jour après jour. Et c’est une façon d’entrer dans le combat spirituel. Et aussi faire mémoire des promesses de Dieu sur notre vie, faire cette relecture. Il faut réaliser combien Dieu a besoin, dans ces petites choses du quotidien, que nous gardions la foi, l’espérance, et la charité, vraiment. Qu’on puisse dire au diable, et se redire à soi-même : Je choisis de ne pas me faire voler ma paix, je choisis de ne pas me faire voler mon espérance, rien ne pourra me voler mon espérance ! On a besoin de poser ces actes de foi .

On sait que ça va bien se finir, on est fait pour la vie éternelle, donc il n’y a pas de surprise sur la fin ; après, sur le comment… là, c’est cet acte d’abandon. Et je sais que certains sont dans des épreuves « costaud », mais même quand on est dans l’épreuve, si on fait cette prière : Seigneur, je ne veux pas qu’on me vole ma paix ! Je ne veux pas qu’on me vole mon espérance ! Je ne veux pas qu’on m’empêche de vivre la charité ! – je peux vous assurer que le Seigneur entend notre prière et que ça nous dispose dans le combat spirituel, ça nous fait entrer dans cette attitude de cœur profonde de se mettre sous le regard du Père pour rester ajusté au regard du Père sur nous, constamment ajusté à sa volonté sur nos vies.

On a besoin de ces moyens de la grâce. C’est une vraie décision et un vrai choix qu’on fait d’entrer dans le combat spirituel. Soit je peux passer mes journées à être ballotté, soit je rentre dedans, mais ce n’est pas moi qui combats à la force du poignet, c’est Dieu qui combat en nous. Mais il a pleinement besoin de notre intelligence, il a pleinement besoin de toutes nos facultés, il a besoin qu’on adhère pleinement à son projet d’amour sur nos vies, qu’on l’accueille, pour que ce projet prenne corps.

Je sais que quand on parle de combat spirituel, cela suscite chez beaucoup de la peur. Il y a une vraie peur, rien que de formuler le terme : combat spirituel. Et cette peur-là est un mensonge. C’est important de réaliser que quand cette peur vient dans mon cœur, je peux entrer dans le combat spirituel, je dois entrer dans le combat spirituel. Je suis enfant de Dieu, et dans l’Église catholique, il n’y a pas de dualisme. On n’est pas dans une foi où il y aurait Dieu qui serait l’égal de Satan. Parfois il y a des courants qui nous viennent du monde, qui nous influencent, et on le voit beaucoup dans les films, on le voit beaucoup autour de nous, cette tension entre le bien et le mal. Oui, le mal est présent, oui, Satan existe, et oui, le mal peut aussi venir de mon cœur blessé, mais Dieu est Dieu et il est tout puissant, et on n’est pas du tout dans un dualisme, dans une opposition à forces égales : Satan n’est qu’une créature. [le dualisme] Ce n’est pas notre foi, ce n’est pas la foi catholique. On doit faire attention à beaucoup de choses qui nous viennent autour de nous, qui inconsciemment transforment notre intelligence, et elle a besoin d’être purifiée, c’est un des aspects du combat spirituel. Donc si la peur vient, j’ai juste comme un enfant à me blottir dans les bras du Père, car là il n’y a pas de place pour la peur. Cela peut être sérieux et difficile, je peux être oppressé, je peux vivre des choses qui ne sont pas faciles, intérieurement, mais je n’ai pas à avoir peur. Le combat spirituel nous est donné pour la croissance et rien ne peut nous séparer de l’amour du Christ. Si mon cœur me condamne, lui ne me condamne pas ! Si on entre dans la peur, on se fige, on ne combat plus, on n’arrive plus à prendre les armes pour entrer dans le combat spirituel.

On doit accueillir ce regard de Dieu sur nos vies, qui vient réajuster les choses. Et le deuxième gros lieu de combat spirituel, je pense que ça, on y est tous confrontés, c’est par rapport à nous-mêmes, à l’image que nous avons de nous-mêmes, à la façon dont nous nous voyons. Et là, on verra comment le Tentateur vient nous bousculer. Il faut avoir conscience qu’il y a ces deux lieux-là. Il y a vraiment beaucoup de mensonges qui sont dits sur nos vies. Et on a besoin de faire ce nettoyage, régulièrement. Il y a un nettoyage que l’on peut faire – on a parlé de la délivrance ce matin, et c’est vraiment très important, pour comprendre cet enjeu de la délivrance dans nos vies. Mais on peut aussi avoir, dans la vie chrétienne habituelle, une hygiène de vie spirituelle, et prendre très régulièrement des temps, où, sous le regard de Dieu, dans la prière, nous lui déposons notre liberté. Nous lui demandons de nous montrer, sur les deux ou trois derniers mois, ou semaines, qu’est-ce qui vient aujourd’hui enclaver ma liberté. Qu’est-ce qui m’empêche d’être libre, quelle parole, quel regard, quelle situation que j’ai vécue et qui m’empêche d’être libre ? Parce qu’on ne peut entrer dans le combat spirituel que si on est libre : c’est un vrai choix, on fait le choix d’entrer dans le combat spirituel. Et on a besoin que le Seigneur nous rende pleinement libres, on a besoin d’aller déposer tout ce qui nous empêche de l’être. Et puis après, on va laisser le Seigneur faire ce travail. À partir de là je peux vraiment entrer dans les lieux de combat pour ma vie. Mais d’abord, demander ce nettoyage, demander au Saint Esprit de nous montrer quelles paroles on a accueillies qui sont fausses, par rapport à notre liberté, quels jugements, on a à les déposer, et pardonner, pour avancer, se ré-accueillir sous le regard du Père, laisser le Père nous aimer. Choisir, se décider, et avoir ces petits moyens de la grâce qui sont là pour nous enraciner dans cette liberté des enfants de Dieu.

Les domaines du combat

Saint Thomas d’Aquin dit qu’il y a trois domaines de combat spirituel, qui sont sa propre chair, le diable, le monde. Trois entrées, si vous voulez, de la tentation : la chair, le diable, le monde. Après on ne dissocie pas, on n’a pas juste à analyser car pas mal de choses sont imbriquées, mais c’est important de comprendre qu’il y a des choses qui viennent de notre cœur, des choses qui viennent de l’esprit du monde qui nous entoure, et des choses qui viennent du tentateur. De notre propre cœur, c’est vraiment cette inclination que l’on a au péché, parce qu’on est blessé, et on en a parlé ce matin, on a fait cette prière[2]. C’est important de laisser Dieu petit à petit dans notre vie faire la lumière. Faisons-lui confiance ; il y a ce travail à faire.

Notre cœur

Saint Jean de la Croix nous dit que dans le combat spirituel, il y a une dimension d’attachement, comme un lien qui nous retient ; une dimension de purification. Il y a besoin de couper ces liens et après, d’un travail de purification, que je pourrais vous présenter, avec mes mots, comme : changer nos habitudes spirituelles. Vous voyez, on a été libéré, mais parfois pour demeurer vraiment dans la grâce de Dieu, il faut changer nos habitudes spirituelles. Et le Seigneur nous donne des moyens pour cela. Par exemple, quand on se rend compte qu’on a un esprit de découragement sur nos vies, on peut demander à Dieu de nous en libérer, pour entrer dans l’audace ; on a besoin de petites choses qui vont vraiment nous aider à quitter le découragement, à ne pas retourner dedans. C’est aussi ce qu’on appelle dans notre vie le déploiement des vertus. Le travail sur les vertus, la patience, la douceur, la bonté, pour que nous soyons toujours plus unifiés, que nous puissions vivre dans une paix plus profonde, dans un enracinement en Dieu qui nous tient, cette posture en Dieu qui est une vraie assise pour nos vies.

Nous avons besoin d’avoir beaucoup d’humour avec nous-mêmes, beaucoup de patience (parfois en accompagnement spirituel je dis : “il faut apprendre à s’aimer”), beaucoup de douceur, ne nous prenons pas au sérieux ! On n’a pas à devenir des spécialistes du combat spirituel, ce n’est pas le but. Le but est de comprendre combien c’est important pour notre vie, pour vivre pleinement et être heureux, mais je vous assure, on est tous en chemin : des fois, on est fier de nous parce qu’on se rend compte qu’on a bien géré, et juste après, on se fait avoir, bing ! Mais bien ! Voilà, cela fait partie de la vie, et je pense que jusqu’à la fin, on sera dans ce processus. Mais soyons bienveillants envers nous-mêmes, parce que le but, c’est de ne jamais nous décourager ; dans notre chemin jour après jour avec le Seigneur, ne jamais laisser place au découragement dans notre cœur. Ste Thérèse nous l’a bien dit, rien ne pourra m’empêcher de me relever, rien, rien, rien, je vous assure, rien. D’ailleurs, c’est dans ces moments-là, où on se décourage de nous-mêmes, que l’on fait le plus l’expérience de la puissance de la miséricorde de Dieu, et dans notre vie, on a besoin de le faire, on a besoin à un moment donné de l’avoir expérimenté. D’avoir été loin, de sentir le Seigneur qui vient nous relever, qui nous rend à nous-mêmes, et quand on vit cette expérience-là, on bascule vraiment dans la vie de disciple. Il y a quelque chose qui change dans notre cœur, il y a un abandon entre les mains du Père, il y a un lâcher prise de notre vie, du désir de notre cœur, de notre besoin de réalisation ; on dépose tout, on sait que Dieu nous aime, et de se laisser aimer par Dieu dans ces moments-là, c’est l’expérience la plus difficile spirituellement qu’on a à vivre dans notre vie. C’est facile de « faire pour Dieu », c’est facile de donner sa vie, c’est facile d’avancer ; dans les épreuves aussi c’est difficile, il y a des épreuves qui peuvent être vraiment des moments où on a besoin d’expérimenter que Dieu nous tient. Mais que ce soit quand notre cœur est déchiré, ou que ce soit dans les moments où notre cœur est humilié, quand on se dit : Comment j’ai pu en arriver là, Seigneur ? – ce sont les moments où la miséricorde de Dieu vient nous relever. On expérimente vraiment ce qu’est la miséricorde, dans ces moments-là. Je pense qu’on a vraiment besoin de le vivre, parce que quand on va arriver au Ciel, dans la vie éternelle, ce qui va compter de toute notre vie, c’est comment on s’est laissé aimer par le Père. Bien sûr, comment on a redonné, mais aussi comment on s’est laissé aimer par le Père.

Est-ce que je me laisse aimer par lui ? Est-ce que j’accueille sa miséricorde ? Est-ce que, quand je vais le voir face à face, je vais aller me jeter dans ses bras ? Face à cet amour si grand, si fort, si beau, si pur, est-ce que dans ce travail de mon cœur, dans le cheminement de ma vie chrétienne, je me laisse aimer par lui ? J’accueille vraiment son amour, jusqu’au bout ? C’est une expérience que l’on a besoin de vivre, on a besoin de se laisser sauver par Dieu, de se laisser aimer vraiment par lui. Et c’est le lieu du plus gros combat spirituel dans notre vie… selon sœur Ruth en tout cas, je n’engage que moi ! Mais je me rends compte qu’ il y a un enjeu tellement fort pour nous, d’apprendre à nous laisser aimer ! Et le Seigneur vient se servir de tout dans notre vie pour ça.

Parfois, plus on avance, et plus je n’ai pas l’impression d’arriver à grand-chose dans ma vie, et pourtant, Dieu fait son œuvre, et cela nous dépasse, et tant mieux ! On est vraiment détaché de la fécondité de notre vie, ce qui compte, c’est de rester sous le regard du Père, de le laisser nous ajuster de plus en plus à sa volonté. C’est un lieu où on expérimente nos limites, nos faiblesses ; on va se confesser, on se laisse aimer à la folie, et on repart, et on avance.

Le second lieu, c’est le monde

Il faut qu’on réalise l’influence des pensées courantes autour de nous, de la société qui nous entoure. Mais je me rends compte en discutant sur le terrain, avec des professionnels de santé, à quel point l’influence de l’esprit du monde peut être très forte, à force d’entendre répéter des mensonges sur la nature humaine – [contraires à] tout ce que nous croyons de l’anthropologie chrétienne , ce que nous sommes sous le regard de Dieu – à force d’entendre répéter des mensonges jour après jour, constamment, qu’on nous rabâche, il y a quelque chose en nous qui peut être influencé. Et on le voit bien, il y a une sorte de syncrétisme aujourd’hui dans l’Église, vous connaissez tous autour de vous des gens qui piochent à droite et à gauche, qui se confient en Dieu, mais pas que. D’où l’importance de mettre sa foi et sa confiance dans le Seigneur. « Je crois en Dieu, mais… je vais quand même tester ça ou ça, ça ne peut pas faire de mal ». Et là, on a besoin aujourd’hui de chrétiens courageux, qui avec beaucoup de patience et de miséricorde, vont annoncer cette bonne nouvelle que le salut nous vient du Christ, que tout est accompli en lui, une bonne fois pour toutes à la Croix, pour toujours. Chacun des jours de notre vie, nous pouvons le proclamer sur notre vie : nous n’avons pas besoin d’autre chose ! Tout nous est donné dans le Seigneur. Nous avons des trésors de grâces à notre portée, c’est important d’en prendre conscience et de transmettre, parce qu’il y a quelque chose dans l’Église qui s’est perdu de la transmission.

On ne nous a pas appris à aller rechercher les trésors de la grâce, alors vous avez la chance d’avoir fait cette expérience de l’effusion de l’Esprit Saint et d’avoir grandi dans l’écoute du Saint Esprit qui vous a conduits, qui vous a montré ce qui était bon pour vous, qui vous a nourris jour après jour, c’est une chance, vraiment. Aujourd’hui il y a une grande détresse spirituelle, une grande pauvreté spirituelle dans le monde autour de nous, et le Seigneur compte sur nous. Il faut se dire que dès qu’il nous fait expérimenter quelque chose spirituellement, il nous envoie en témoigner, le partager. On ne reçoit pas que pour soi-même, soyons attentifs aux gens que le Seigneur met sur notre route. Parfois, une parole d’encouragement, une parole de consolation ; on va être là au bon moment pour la personne, il y a quelque chose qui va pouvoir basculer dans sa vie. Il faut que l’on soit prêt, parce que le Seigneur va envoyer de plus en plus de monde. On va avoir besoin de chrétiens qui soient affermis, forts dans la foi ; parce que je vous assure que le réveil arrive, il est évident que le réveil arrive, c’est mathématique, c’est l’histoire de l’Église ! et quand les gens frappent à la porte de nos églises, qui est là pour les accueillir et les faire grandir dans la foi ? Si on ne le fait pas, si nous ne prenons pas notre place, personne ne le fera à notre place. On doit être attentif aux personnes qui nous entourent, attentif à ceux que le Seigneur met sur notre route, on doit être toujours « prêt à rendre compte de l’espérance qui nous habite », nous dit la Parole. Cela m’est même arrivé au rayon confitures d’une grande surface ! Je vous assure que le Seigneur se sert vraiment de tout. Des fois vous êtes un peu tranquilles, mais non, chez la coiffeuse, partout ! Dans notre société il n’y a plus de séparation entre les sphères privée et publique. Donc la question de la foi, la question de la pratique religieuse, elle devient courante aujourd’hui, elle est omniprésente. Dès qu’on porte une croix, très vite le sujet peut venir. Et c’est important de pouvoir témoigner simplement, simplement que les gens sachent : oui, je crois. De savoir que vous avez la foi, au travail, partout, quand ils ont un problème, quand ils vivent un deuil, quand ils sont en difficulté, je peux vous assurer qu’ils viennent vous voir. Et je pense que là, on pourrait faire une queue des témoignages et on pourrait s’émerveiller de la grâce de Dieu dans nos vies.

Mais vous voyez qu’on a besoin que le combat spirituel soit une assise dans notre vie ; qu’on ait conscience des moments où on a à entrer dans ce combat. « Cette pensée n’est pas de Dieu, cette pensée n’est pas pour moi ». Par rapport au monde qui nous entoure, on doit être au clair. On doit préserver notre cœur, ne pas laisser la confusion de notre esprit troubler notre cœur. Je peux accueillir l’autre dans ce qu’il vit, dans ce qu’il me partage de ses expériences, de ses choix, l’accueillir dans la charité de Dieu, mais je ne rentre pas dans une forme de confusion. Je sais qui je suis sous le regard du Père, et ce que je veux vivre, et pour quoi j’ai donné ma vie à Dieu. Et entrer dans le combat spirituel c’est demeurer en Dieu, sous le regard du Père, chercher à demeurer le plus possible jour après jour dans la paix et l’amour du Père. Il peut y avoir la tempête au-dessus, au fond de mon cœur il y a cette paix, il y a ce roc, il y a la foi, l’espérance et la charité que j’ai mises en Dieu, et je sais que jamais, jamais, jamais je ne serai perdu. Toujours je peux venir à lui, à chaque instant. On peut faire l’exercice maintenant si vous voulez : on va fermer les yeux et on va accueillir ce regard du Père qui est posé sur nous maintenant. Ce regard du Père qui sourit, qui se réjouit, qui regarde chacun avec tellement de joie, tellement de tendresse et de joie. Cette parole est pour chacun dans cette assemblée, personne n’est exclu. Si ton cœur te condamne, lui ne te condamne pas. Le Père se réjouit, il se frotte les mains en se disant : oh ! Quelle belle créature ! Quelle joie d’avoir pu te créer ! (dites votre nom) Il voit dans l’espérance tout ce que vous portez, tout ce qui va encore se déployer dans votre vie, il se réjouit par avance, il est en dehors du temps, il se réjouit du bien que vous faites. Il ne voit pas vos péchés, il les a oubliés, quand vous vous êtes confessés ; ce que lui il voit, c’est le bien que vous faites, c’est la charité que vous portez autour de vous. C’est toutes les fois où vous vous oubliez pour vous donner. Le Père nous aime à la folie. Il est là, il te regarde, et il t’aime, il se réjouit de toi.

« Père, je te rends grâce pour ta sagesse, la façon dont tu viens parler à tes enfants, parce qu’ils gardent leur cœur d’enfant ; parce qu’ils ont besoin de toi, qu’ils le savent, et qu’ils viennent à toi comme des enfants. Je te rends grâce, Père, je te bénis pour toutes les fois où tu viens combattre dans nos cœurs, pour toutes les fois où nous pouvons venir à toi en disant : Seigneur, je n’en peux plus, j’en ai marre, cette fois-ci c’est bon, ras le bol ! Pour toutes les fois où tu nous laisses librement te parler, tu viens à nous, tu viens nous prendre par la main, tu viens nous serrer sur ton cœur, tu viens toi-même combattre pour nous ; tu viens toi-même chasser nos pensées, tu viens toi-même libérer nos cœurs, nos corps, parce que tu veux combattre pour nous, et tu aimes à combattre pour nous. Seigneur, je suis libre en toi, et je ne me connais qu’en toi, il n’y a que ton regard sur ma vie qui compte ; je veux me recevoir de toi, Seigneur, je crois pleinement que je suis ton fils, ta fille bien-aimée. Tu es là, Père, tu es là, mon Père bien aimé. »

Vous voyez, cet exercice, on peut le faire à tout moment de notre vie. Cela m’est arrivé, dans des moments difficiles, d’aller quelques minutes dans les toilettes, fermer les yeux, demander au Père de venir me bénir, accueillir le regard du Père sur ma vie. À tout moment de la journée vous pouvez fermer les yeux quelques secondes, et ré-accueillir ce regard du Père sur vos vies. On en a besoin ! On ne nous demande pas de vivre notre vie chrétienne à la force du poignet, ça c’est un mensonge. On ne sera pas sauvé à cause de nos mérites, à cause de ce que l’on fait, on est aimé et sauvé gratuitement. Le Père nous aime, et c’est son bonheur de faire notre bonheur, il ne demande que ça, de venir à notre secours, de venir nous aider dans le combat, quand ça ne va pas, qu’on puisse se tourner vers lui. Nous, on a tendance, quand notre cœur est blessé, à se fermer et à se replier sur soi, c’est un mécanisme humain de défense ; mais laissons une petite brèche ouverte à l’amour du Père pour le re-choisir et pour qu’il puisse venir combattre pour nous. Remettons-lui ces situations.

Le troisième domaine de tentation, c’est le diable et ses tactiques

Il fait beaucoup de bruit et il n’y a pas grand-chose derrière ; mais justement il fait beaucoup de bruit et ce bruit peut induire la peur dans nos cœurs, mais vous avez bien compris que c’est hors de question. On ne laisse pas la peur, on peut être intimidé, il peut y avoir des choses pas faciles dans le combat spirituel, mais pas la peur. Renonçons à la peur et remettons-la au Seigneur.

Il est le tentateur, il est l’accusateur de nos frères, ça il sait faire ! Il peut agir sur nos sensations, sur nos pensées ; il est séducteur, il est menteur et père du mensonge, il sait faire naître le soupçon, ça commence toujours par un petit soupçon dans le cœur, sur quelqu’un, sur une situation ; il est au top pour nous décourager, ça c’est le must, susciter le découragement dans les cœurs. On est tellement humainement pris par le temps, on a tellement besoin que les choses viennent vite, mais Dieu il n’a pas le même rythme que nous ; et donc c’est assez facile pour le diable de nous faire basculer dans le découragement. On prie, et voilà, au bout d’une semaine, quand on n’est pas exaucé, ça y est, on commence à entrer dans le découragement, mais non, on doit prier jusqu’à ce que quelque chose se passe, demeurer dans la prière, demeurer dans la confiance et dans la foi.

Le combat spirituel dans nos groupes de prière

Le domaine matériel

Dès qu’il y a un enjeu spirituel, il y a un combat qui y est lié ; mais quand on le sait, c’est tellement plus simple ! C’est beaucoup plus simple de se le dire dans la charité fraternelle entre nous, et de l’affronter, de prendre les bonnes armes, paisiblement, et de s’y atteler. Il y a différents domaines, et d’abord le domaine matériel. Comme vous savez, c’est quand on veut prier que la sono ne fonctionne pas, ou le vidéoprojecteur, la voiture qui tombe en panne – moi je me suis fait voler mon portefeuille il y a deux semaines : tout ce qui pourrait nous faire sortir de la paix, tout ce qui pourrait nous distraire de la prière qu’on va vivre, du temps qu’on va vivre ensemble et qui est important. Là vous pouvez être sûr qu’il s’en donne à cœur joie. Donc on doit être attentif et on doit s’encourager. Et là il y a une clef importante au niveau matériel (sono, etc.) : par exemple si on prie à 20 h, on fait de notre mieux pour que tout soit prêt à 20 h. À partir du moment où on commence à prier, on prie ! Et là ce n’est pas le moment de s’occuper du matériel. Je parle des petits groupes où le berger a un peu la responsabilité de tout dans le groupe, et il se laisse distraire. Bon, quand on prie, on prie, on y va. Cela peut arriver de commencer la louange sans micro, sans rien, juste avec une guitare, et ce n’est pas grave : quand on commence à prier, on y va, et rien ne doit nous distraire de la prière à ce moment-là. Juste parce que votre cœur est disposé dans la foi, on va instantanément être dans la présence de Dieu. Ne nous laissons pas distraire par des choses matérielles, sortir de la prière. C’est un combat inutile, ce n’est pas là que Dieu vous attend. Je vous encourage à être vigilants, et dans la charité fraternelle, quand vous voyez quelqu’un qui est stressé, prenez-le doucement, et encouragez-le : viens, on va prier. Et vous allez voir que le climat spirituel va changer.

Le domaine de la communion fraternelle

Le deuxième lieu, qui est plus important encore, c’est le domaine de la communion fraternelle. Je pense que vous l’avez tous expérimenté, que quand il y a un enjeu spirituel, alors ça, ça clashe ! on ne se comprend plus, il y a des tensions qui s’installent, des clivages, des difficultés, et on a besoin, pour entrer dans le combat spirituel à ce moment-là, de comprendre, d’accueillir dans nos vies, dans nos cœurs, et d’y croire, qu’il n’y a pas de malveillance entre nous : dans un groupe de prière on est tous bienveillants les uns envers les autres. À partir du moment où on va entrer dans ce regard-là sur ses frères et sœurs,  il n’y a pas de malveillance dans le cœur de l’autre. Oui, l’autre peut me blesser, il ne s’en rend pas compte ; oui, il peut y avoir des choses parfois difficiles, il y a notre péché, mais il faut comprendre qu’on est tous humains, et croire que si on choisit de se rassembler en Corps du Christ pour prier ensemble, poser un regard de bienveillance sur chacun. À partir de là on peut entrer dans le dialogue, on peut s’accueillir sous le regard de Dieu ; on peut dépasser ce qui nous heurte, ce qui nous blesse, dans ce que l’autre a pu dire, cela fait partie de nos identités blessées ; et plus que ça, nous sommes frères et sœurs en Christ et on doit rechercher la communion. Et je sais que ce n’est pas facile ; on vit ce combat-là dans nos familles, dans tous les domaines où on est avec d’autres personnes, surtout quand il y a un enjeu spirituel fort, mais il doit y avoir vraiment une décision de notre cœur : je crois vraiment dans la bienveillance de mon frère ou de ma sœur, et je crois que Dieu va bénir, il vient, il voit nos efforts pour grandir dans la charité, la communion fraternelle ; tout l’enjeu spirituel de notre groupe de prière ce n’est pas notre prière, c’est nos efforts pour nous aimer les uns les autres, nos efforts pour nous accueillir en vérité. Il y a une vraie fécondité spirituelle qui se joue. Si on fait semblant de s’accueillir et puis après, on loue le Seigneur, non ! cherchons avec beaucoup de patience, de bienveillance, … je sais que ce n’est pas facile, mais il faut qu’on réalise à quel point l’enjeu de notre groupe de prière, il est d’abord là. « Voyez comme ils s’aiment ! » Le témoignage et la fécondité spirituelle de nos groupes, il est d’abord là. Et plus on va rechercher la communion, la charité fraternelle, et plus Dieu va venir bénir. C’est un lieu de décision de cœur, simplement, en vérité, de patience. Comme vous êtes patients et bienveillants envers vous-mêmes, soyez-le envers les autres.

Ce sont les deux lieux où vous allez être attaqués, qui vont éteindre la fécondité : tout ce qui peut empêcher la prière, et tout ce qui peut éteindre la communion fraternelle. J’aimerais vous donner un autre conseil. On nous a dit qu’il fallait préparer son cœur sur la route, en venant[3] ; et j’aimerais aussi qu’on apprenne tous à entrer efficacement dans la prière. C’est simple, ce n’est pas compliqué ; parfois on perd beaucoup de temps. Allez à l’essentiel, allez au Seigneur ! il suffit de commencer un chant de louange, un parler en langues, quelques instants, et Seigneur, je suis là devant toi, je suis là pour toi. On a pensé qu’il fallait tout un processus pour entrer dans la prière, mais je vous assure qu’on peut aller beaucoup plus vite. Demandons au Seigneur de nous lancer. Désirez dans votre cœur que dès qu’on commence à prier, on soit dans la présence de Dieu. Des fois nous avons des habitudes, mais le Seigneur veut les déconstruire pour nous rendre plus simples, plus efficaces dans la prière et dans la communion. On ouvre nos cœurs, et on y va ! Quand on prie en noyau, avant de prier dans l’assemblée, ça dure cinq minutes : on a besoin d’être efficace, on se plonge dans la prière ; ou aussi quand on doit prendre un temps de prière des frères. C’est quelque chose qui a besoin d’être renouvelé dans la vie de nos groupes. Souvent on se laisse enseigner par des jeunes qui reviennent à la foi, qui sont tout feu tout flamme, qui viennent de faire l’expérience du Saint Esprit : quand ils se mettent à prier, c’est beau, c’est simple, c’est avec leurs mots, mais c’est tellement béni, tellement imprégné de cette expérience qu’ils viennent de faire qu’instantanément ils sont dans la présence de Dieu. Et nous, on a à retrouver ce cœur d’enfant, retrouver cette simplicité : je viens à toi, mon Père, et on prie.

Se connaître et demander pardon

Une autre dimension du combat spirituel, c’est de comprendre qu’on a besoin de se connaître, on a besoin de savoir quelles sont nos fragilités, nos limites, quels sont les lieux de vulnérabilité au combat spirituel dans mon cœur, les lieux où « je me fais avoir » par l’ennemi ; et cela, ça fait partie de la connaissance de soi dans la vie chrétienne, et c’est important pour nous. Comment je repère ces lieux où, tout le temps, je dérape. Je m’en rends compte après. On s’est fait avoir, sur ou tel point, dans notre vie, dans notre cheminement… Ce n’’est pas grave, on demande pardon à son frère ou à sa sœur, si on a eu une pensée de jugement, et ça fait grandir l’amour, la charité entre nous d’avoir cette simplicité dans nos relations, savoir faire le premier pas, savoir demander pardon. C’est un des aspects où on désarme l’ennemi. C’est l’accusateur de nos frères, alors il passe son temps à vouloir subtilement déplacer le curseur pour nous faire juger, et quand on sait avoir cette habitude de se demander pardon – « excuse-moi, je me suis énervé contre toi tout à l’heure, mais ce n’était pas contre toi, je suis désolé » – cette habitude d’être vrai les uns envers les autres, cela fait grandir la charité et nous protège les uns les autres. Apprenons à nous demander pardon, simplement.

Les prières de protection

Pour nous aider et nous donner d’autres outils dans le combat spirituel, il y a les prières de protection : il faut prendre l’habitude sur nos groupes d’invoquer le Sang précieux de Jésus, de demander la protection, quand il y a un enjeu spirituel, sur nos groupes de prière, dans nos familles, quand on sent qu’on n’est pas trop bien, invoquer le Sang précieux de Jésus sur nous. On peut demander à Marie de nous couvrir de son manteau : la puissance de protection de la Vierge Marie ! Cela doit être une habitude, dès qu’on est un peu troublé, qu’on se sent fragile. Il existe le rituel Protection Délivrance Guérison, édité par l’Église catholique, qui donne des prières de protection qui sont vraiment intéressantes. Il y a plein de lieux, on nous donne des outils pour entrer dans le combat spirituel, apprendre à demander la protection de Dieu sur nos vies, pour couper toute possibilité à l’autre de nous atteindre.

Contempler Jésus

Il y a un autre « outil » spirituel que j’aime beaucoup, c’est de contempler Jésus. Contempler Jésus à Gethsémani. Quand vous sentez que vous n’avez plus trop la force de choisir Dieu, de prier, de rentrer dans le combat, que vous vous sentez affaibli, contemplez Jésus quand il nous dit : « mon âme est triste à mourir, demeurez ici et veillez avec moi ». Laisser ces paroles résonner ; cela ravive en nous ce désir de communion au Christ qui est entré dans le combat spirituel pour chacun de nous. Il nous a sauvés individuellement, chacun de nous, il est mort sur la croix pour chacun de nous. On entend Jésus faire cette prière : « Père, tout t’est possible, éloigne de moi cette coupe… Mais pas ce que je veux, ce que tu veux. » Qu’on puisse contempler Jésus et faire nôtre sa prière. Dans certaines épreuves, on a l’impression que Dieu est loin, c’est vraiment le moyen de la grâce. Communier à la souffrance de Jésus : il a souffert pour moi, je souffre, mais il est là avec moi.

La Parole de Dieu

On a besoin de proclamer la parole de Dieu à haute voix, de s’entendre proclamer la Parole. Vous avez des armes qui vous sont données à chacun ; dans votre vie déjà, vous avez des versets qui sont pour vous des armes. Vous savez que quand vous les proclamez, vous entrez dans le combat et vous retrouvez le chemin du cœur du Père, instantanément. Et c’est important de les garder, de les écrire, de les avoir à portée de main, les mémoriser, les reprendre ; et on doit les confesser à haute voix ; quand on proclame la parole de Dieu à haute voix, elle est efficace et agissante. Je peux avoir mon cœur troublé, j’ai besoin de m’entendre proclamer la Parole de Dieu, de m’entendre confesser que je crois que Dieu est mon Père, qu’il m’aime, et toutes ces proclamations, toutes ces paroles de bénédiction sur nos vies, cet appel, cette invitation au bonheur qui nous est faite. L’Esprit Saint vous conduit, vous donne ce dont vous avez besoin jour après jour, écoutez-le. Notez, gardez, faites mémoire de ce qu’il vous a donné.

La bénédiction

Une autre arme très efficace, c’est d’appeler la bénédiction. Nous sommes appelés à bénir. Quand vous sentez que vous avez le cœur troublé, que vous êtes en difficulté avec quelqu’un, ou sur une situation, sur un lieu, appelez la bénédiction de Dieu. Vous allez voir l’atmosphère changer, vous allez voir votre cœur changer. On a besoin d’apprendre à appeler la bénédiction de Dieu sur notre vie. Commencez par bénir votre vie ! Commencez par rendre grâce à Dieu depuis le jour de votre conception jusqu’à aujourd’hui : « Seigneur, je te rends grâce pour la merveille que je suis ! » et « Merveilles que sont tes œuvres ! » On a besoin d’être patient et bon, charitable envers soi-même pour pouvoir aimer les autres ; le Seigneur nous demande de nous aimer nous-mêmes pour pouvoir aimer les autres. Appelons la bénédiction de Dieu aussi pour entrer dans cette vérité du regard de Dieu sur notre vie. Quand j’accueille la bénédiction, j’accueille le regard du Père sur ma vie, mais je l’accueille en vérité, jusqu’au bout. Je peux du coup accueillir mes fragilités, mes limites et mon péché. Quand on se laisse aimer, dans l’amour du Père on peut accueillir la vérité sur sa vie et on peut laisser Dieu éclairer nos cœurs et nous emmener plus loin avec lui. Plus on va entrer dans la bénédiction, plus on va bénir ceux qui nous entourent, nos proches, ceux que nous croisons dans la rue ; on va bénir les lieux, quand on marche dans la rue. Plus on entre dans la bénédiction, plus notre bouche va apprendre à arrêter de médire. On a cette habitude de juger, de critiquer, de porter rapidement un jugement sur l’autre sans toujours tout savoir, et la bénédiction vient changer nos habitudes.

L’accompagnement

Et puis nous avons besoin de nous faire aider, ne pas être seuls dans le combat spirituel. Pour ceux qui sont accompagnés, c’est important de s’ouvrir à cette dimension-là dans l’accompagnement, de partager nos lieux de combat spirituel. Parfois il y a des combats où on a besoin d’aller voir un prêtre, de demander la prière de nos frères. En communauté, n’hésitons pas à nous porter les uns les autres, simplement, humblement dans la foi. La prière des frères dans ces situations-là est très efficace. Quand on a l’humilité de demander le soutien de ses frères dans le combat que l’on peut vivre, pour son chemin de sainteté, quand il y a des liens à couper, des libérations à vivre, c’est d’une efficacité ! Le Seigneur se réjouit tellement, il fond ! Et il déploie toutes les grâces qu’il peut, il est ingénieux dans son amour pour nous à ce moment-là. Si on apprend à s’aimer, on sait qui on est et on peut avoir le courage de demander à nos frères la prière. C’est l’humilité, c’est la vie des enfants de Dieu : être enfant dans la foi, c’est ça. J’ai besoin de mes frères et sœurs, de mon Père, jour après jour. Et ça nous fait un bien fou de vivre ça en communauté, en frères et sœurs.[4]

L’ange gardien

Il y a aussi notre ange gardien qui est là pour nous donner un petit coup de pouce, un gros coup de pouce, même[5]. Il nous donne des motions intérieures, on sait que ce n’est pas le Saint Esprit mais notre ange gardien. Il est là pour nous protéger.

On a besoin de vivre tout ça. Soyons simples et encourageons-nous les uns les autres, dans la foi. On essaye, on apprend petit à petit, et il y a des moments où on repère bien les enjeux, mais il y a un tel bonheur à préserver ! Nous devons juste avoir ce désir de préserver notre communion avec Dieu coûte que coûte, de préserver ce trésor de nos cœurs. Ma paix, cette paix que Dieu me donne, cette joie qui me vient de Dieu, c’est mon trésor ! Il est à moi, ce n’est pas juste Dieu qui donne, qui reprend, non, je peux en vivre ; cette paix elle est là, au fond de notre cœur, et elle ne bouge pas, elle est immuable, c’est un don que Dieu nous fait chacun des jours de notre vie. Même dans les pires détresses, les pires tribulations, la paix de Dieu habite notre cœur, parce qu’on est ses enfants par le baptême et qu’on a été sauvé une fois pour toutes. Et l’espérance, on peut la renouveler autant qu’on veut dans notre vie, la foi, la charité, si nous venons à Dieu et lui demandons, le laissons être Père. Il y a des épreuves qui sont plus longues, plus difficiles, il y a des moments où on souffre vraiment, on a l’impression d’être éloigné de Dieu. Quand notre cœur est tellement douloureux qu’on n’arrive pas à se tourner vers lui. Mais on peut comprendre spirituellement à ce moment-là que la paix de Dieu est dans mon cœur. Oui, je souffre, c’est le tempête, je ne sais pas, là, où j’en suis, je ne sais pas ce que je vais devenir demain, mais la paix de Dieu est dans mon cœur. Oui, je vis un deuil, oui, mon cœur est déchiré, mais la paix de Dieu habite mon cœur, elle est là quand même, elle est là avec la souffrance, il n’y a pas que la souffrance dans mon cœur.

Repérons ce qui fait écho en nous dans cet enseignement, repérons nos lieux de découragement, et repérons nos failles ou lieux de fragilités dans le combat spirituel, les portes par lesquelles le tentateur s’engouffre pour me faire vaciller.

[1]Par exemple le témoignage du fr. Daniel-Marie.

[2]Voir l’enseignement du fr. Daniel-Marie sur la délivrance.

[3]Voir l’enseignement de sœur Tabitha sur la ferveur.

[4]Ici sœur Ruth a donné quelques éléments de témoignage personnel sur le combat spirituel dans la mission. « Quand on donne sa vie au Seigneur, on a bien notre dose de combat spirituel. Mais c’est une joie de savoir qu’il y a une vraie fécondité, c’est une joie de savoir que Dieu bénit, qu’on va accueillir la gloire du Seigneur ensemble, et qu’il va nous emmener plus loin. Et tant mieux s’il a besoin de nous ! »

[5]Ici sœur Ruth a donné un témoignage de désobéissance à son ange gardien, lié au vol de son portefeuille.

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Autres enseignements à ND du Laus 2023 :

La ferveur :

https://fraternitepentecote.fr/2023/09/12/session-notre-dame-du-laus-2023/

La prophétie :

https://fraternitepentecote.fr/2023/12/27/nd-du-laus-la-prophetie/

Le témoignage du frère Daniel-Marie

https://fraternitepentecote.fr/2023/09/22/nd-du-laus-le-temoignage-de-frere-daniel-marie/

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