L’important, c’est de participer !
(Edito par Marie-Hélène Martin)
Pendant toute l’année qui vient de s’écouler, l’impossibilité de se réunir physiquement a conduit nos groupes de prière et nos communautés paroissiales à trouver des biais pour maintenir une communion absolument essentielle, car l’homme ne vit pas seulement de pain ! Les liens internet, les réseaux sociaux, le téléphone, sont apparus comme des substituts précieux pour entretenir la relation fraternelle et l’insertion ecclésiale :
visioprière, messes « zoom »...
Pourtant, chez les catholiques en particulier, des voix se sont élevées pour protester contre les restrictions que l’État imposait aux rassemblements de personnes, certains allant même jusqu’à y voir une atteinte à la liberté de culte. À l’inverse, des gens du spectacle par exemple ne comprennent pas qu’on puisse se réunir dans une église, et pas dans une salle de théâtre, de cinéma ou de concert …
Il va de soi que participer à une « réunion zoom » (ou autre du même genre) n’équivaut pas à prendre place au sein d’une assemblée de prière, encore moins à une eucharistie « en vrai ». On peut certes vivre une communion de désir, cela n’empêche pas de désirer une communion « pour de vrai ».
Mais que veut dire participer ?
Pour moi, ce verbe fait immédiatement écho aux chapitres concernant la sainte liturgie dans les constitutions du Concile
Vatican II. La réforme liturgique de cette époque n’avait qu’un but, inlassablement répété : la participation consciente, active et fructueuse (§ 11), pleine et active (§ 14), intérieure et extérieure (§ 19) des fidèles à la célébration de l’eucharistie. Et ce que l’on voulait abolir, c’était l’attitude qui consistait à « assister à ce mystère de la foi comme des spectateurs étrangers ou muets » (§ 48).
J’étais ado à cette époque, et je prenais ce terme au premier degré : il fallait participer à la chorale paroissiale, participer aux différentes tâches que requiert la vie concrète d’une église, être actif et non passif … dans une atmosphère très marquée « action catholique », militante, etc. Et aujourd’hui encore il m’arrive de me demander si certains de mes frères et sœurs du groupe de prière participent vraiment à la prière, quand je les vois somnolents sur leurs chaises, les yeux mi-clos, et muets comme des bûches ! Aussi est-ce avec grande satisfaction que, à la faveur du confinement, j’en ai vu beaucoup qui sortaient de cette apparente passivité, et faisaient part des motions de l’Esprit reçues lorsque nous nous mettions en prière, chacun chez soi mais tous au même moment – n’attendant plus que la parole soit donnée « rituellement » par un tel, une image par une telle, une exhortation par tel autre, comme si eux-mêmes n’avaient pas reçu de semblables charismes. Ainsi ont-ils pris davantage conscience que
« chacun est pour sa part membre du Corps du Christ »
(1 Co 12, 27).
Participer, ce n’est donc pas seulement et même pas nécessairement jouer un rôle actif dans une entreprise commune, comme une compétition sportive. Tandis que Marthe s’active et se démène, n’est-ce pas Marie qui a choisi la meilleure part (Luc 10, 42) ? Car le seul fait d’être membre du Corps du Christ, de n’être qu’un seul Corps, participant à un seul pain (1 Co 10, 17), nous donne part à l’héritage des saints (1 P 1, 4). Même devant nos écrans, même micro coupé, nous ne sommes pas des spectateurs « muets et étrangers » à ce qui se passe dans une liturgie rediffusée,
si nous avons conscience « de ne faire plus qu’un dans la foi » et de « réaliser la plénitude du Christ » (Ep 4, 13),
à travers une communion qui transcende toutes nos pauvres représentations humaines. Ne nous inquiétons donc pas des éventuelles contraintes, présentes ou à venir, qui nous empêcheraient de nous réunir physiquement. Acceptons-les comme un temps de purification, laissons-nous « laver » de pied en cap par Jésus, sans lui opposer le refus de Simon-Pierre, sans quoi il pourrait nous dire : « tu n’as pas de part avec moi » (Jn 13, 8). Car Pierre a fini par le comprendre : si nous nous laissons inonder de sa grâce, il nous donnera un jour de participer à sa gloire (1 P 5, 1).
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