Pentecôte hier et aujourd’hui

Pentecôte hier et aujourd’hui

Père Joseph BOISHU
Article de 1997, alors qu’il était Supérieur du Grand Séminaire de Rennes. Il fut ensuite évêque auxiliaire de Reims et responsable du groupe épiscopal d’accompagnement du Renouveau. 

Pour une juste compréhension de la grâce de Pentecôte

© FP

L’expérience de Pentecôte spécifie le Renouveau… chaque fois que les participants d’une assemblée charismatique se réunissent pour prier ensemble, ils demandent avec foi et d’un seul cœur qu’il leur soit donné de vivre une “petite” Pentecôte.”(“Qui fera taire le vent?”, Etienne Garin, D.D.B. 1988)

Demandez à un croyant de vous parler de l’événement de Pentecôte. Que va-t-il vous raconter ? Où va-t-il arrêter son récit ?… après la venue de l’Esprit ?… après le discours de Pierre ?… après les premières conversions ?…

Il est vrai que la liturgie de la Pentecôte nous a habitués à entendre un récit tronqué. En effet, celui-ci s’arrête avant la fin du texte de Luc. Peut-être a-t-on pensé qu’il n’était pas bon d’achever la lecture sur la dernière exclamation de la foule : “Ils sont pleins de vin doux.” ?

Dans les groupes de prière, on a pris conscience que la grâce du Renouveau est une grâce de Pentecôte. Mais la perçoit-on dans toute son ampleur et sa profondeur ? Ne la réduit-on pas au simple exercice des charismes … au risque de ne pas s’ouvrir en plénitude au Don de Dieu?

Aller jusqu’à la fin de “l’histoire”

Il me semble qu’on ne peut pas se contenter de la lecture des onze premiers versets du 2° chapitre des Actes si on veut savoir ce qu’est la Pentecôte. Cet événement, c’est la venue de l’Esprit et les réactions de la foule ; c’est la prédication prophétique de Pierre et les cœurs bouleversés ; c’est aussi l’apparition de la première communauté chrétienne, figure exemplaire de ce que doit toujours être l’Eglise… Il faut aller au moins jusqu’à la fin du 2° chapitre des Actes si on veut avoir une petite idée de cet événement.

Il faudrait même continuer sa lecture. C’est tout le livre des Actes qui témoigne de ce qu’est la Pentecôte. Quand Pierre guérit un infirme au Temple, quand la communauté se partage les biens
ou institue les Sept, quand Pierre va chez Corneille, quand Etienne témoigne jusqu’au don de sa vie, quand Barnabas et Saul partent sur les routes prêcher aux païens, quand les Apôtres se réunissent en “Concile” à Jérusalem… c’est l’Esprit que Jésus ressuscité a donné à la Pentecôte qui continue son action sanctificatrice et évangélisatrice… C’est Lui qui met en œuvre la grâce pascale du Christ. Il est cette grâce pascale ! Les “Actes” des Apôtres Pierre et Paul sont “normatifs” pour l’Eglise de tous les siècles. En ce sens, ils manifestent pleinement le mystère de l’Esprit à l’œuvre dans le monde et l’Eglise.

Mais l’Esprit n’a jamais fini de créer du neuf

De siècle en siècle, Il répand dans l’Eglise, toujours sous des formes nouvelles, l’inépuisable richesse du Christ. Le charisme de la vie monastique qui apparaît avec St Antoine au 3° siècle, le travail
théologique des Pères de l’Eglise et le charisme des Docteurs de la foi, les grands mouvements missionnaires qui ont évangélisé l’Europe et plus tard l’Asie et l’Afrique, l’efflorescence de la vie religieuse et de la vie mystique, la naissance de l’action catholique et l’approfondissement du sens du baptême chez les laïcs, l’épanouissement de la spiritualité du mariage, l’événement du Concile Vatican II… autant de réalités diverses qui manifestent la présence de l’Esprit mettant en œuvre pour chaque époque le mystère du Christ. Il faut donc attendre la fin de l’histoire pour parler de manière “exhaustive” de la Pentecôte…

Devenir des “chrétiens trinitaires”

Essayons d’approfondir un peu notre perception de la grâce de Pentecôte. Pour simplifier, faisons-le à partir du Catéchisme de l’Eglise Catholique.
Le jour de Pentecôte, la Pâque du Christ s’accomplit dans l’effusion de l’Esprit Saint qui est manifesté, donné et communiqué comme Personne divine : de sa Plénitude, le Christ, Seigneur, répand à profusion l’Esprit.” (n°731 ).

C’est la Personne même de l’Esprit qui est donnée et non seulement une puissance divine comme dans la première alliance.

Nous avons à en respecter la présence et la liberté. Ceci peut déjà nous aider à ne pas mettre la main sur Lui comme sur une puissance cosmique.

En ce jour est pleinement révélée la Trinité Sainte.” (n°732). Dans la mesure où nos frères baptisés “au nom du Père, du Fils et de l’Esprit” deviennent des chrétiens “trinitaires”, dans la mesure où chaque personne de la Trinité trouve sa place juste dans leur foi, alors nous n’avons pas perdu notre temps. Il est essentiel de sortir de ce déisme que nous avons connu ou de ce “christisme” qui oubliait et le Père et l’Esprit.

Les fruits de la grâce de Pentecôte

© FP

Dieu est Amour” et l’Amour est le premier don, il contient tous les autres.” (n°733). A partir de là, le Catéchisme développe les points premier effet du don de l’Amour est la rémission des péchés.” (n°734).

Parce que nous sommes morts,  ou, au moins, blessés par le péché, le “prémices” le premier effet du don de l’Amour est la rémission des péchés.” (n°734). Nous voyons des conversions authentiques et des frères et sœurs retrouver le sens du sacrement de réconciliation.

Il donne alors les “arrhes” ou les “prémices” de notre Héritage : la Vie même de la Trinité Sainte qui est d’aimer “comme Il nous a aimés” (n°735). Cet Amour n’est pas d’abord un sentiment. Il s’exprime dans le don de soi, dans le service humble, dans le pardon. Aucun
doute n’est permis: si nous constatons ceci chez nos frères – ou en nous -, l’Esprit de Pentecôte est bien là. Cette force d’aimer s’exprime aussi dans la patience au moment de la souffrance.
Combien de nos frères vivent une maladie ou une souffrance morale avec une patience pleine d’humble confiance !

Celui qui nous a greffés sur la vraie Vigne, nous fera porter le “fruit de l’Esprit qui est charité, joie, paix, longanimité, serviabilité, bonté, confiance dans les autres, douceur, maîtrise de soi” (Ga 5, 22-23) (n°736). Ce sont ces fruits qui touchent ceux qui viennent pour la première fois dans un groupe ou un rassemblement : cette joie, cette serviabilité, cette confiance les uns dans les autres… Sans la Pentecôte, ces fruits ne seraient pas donnés…

Et nous pourrions continuer : l’amour de l’Eglise, la prière pour les prêtres et les vocations, la louange et la ferveur de la prière, le sens de l’Eucharistie, l’ouverture à l’œcuménisme, l’amour des pauvres et le souci de se rendre proches d’eux, la redécouverte de la Parole comme source de vie… Autant de facettes variées de la même grâce de Pentecôte.

Sans oublier, bien sûr, l’évangélisation. C’est essentiel. Et sans doute, a-t-on encore besoin d’encourager nos frères à se risquer dans le monde pour annoncer le Christ. Il suffit de parcourir les Actes pour voir comment le Souffle de l’Esprit emporte les missionnaires sur des rivages nouveaux, avec l’audace que donne le Père à ses enfants. Pour cette aventure, les charismes sont donnés. Ils sont indispensables mais ils ne sont pas le tout de la Pentecôte.

Pour approfondir :

  • Lire ou relire les Actes des Apôtres en allant jusqu’au bout de “l’histoire” : qu’ai-je glané de nouveau pour moi-même, pour la vie de mon groupe de prière, pour ma vie en Eglise ?
  • Essayer d’énoncer tout ce qui manifeste cette présence de l’Esprit de Pentecôte dans ma vie et dans celle de mon groupe de prière.
  • “Devenir des chrétiens trinitaires” : quelle place occupe dans ma relation à Dieu chacune des personnes de la Trinité ? Si j’enseigne dans le groupe, ai-je le souci d’ouvrir les frères et sœurs à cette dimension trinitaire ?
  • A la lumière de cet article, quels seraient les ajustements à apporter dans les enseignements donnés au groupe ou dans la préparation à l’effusion de l’Esprit ?

 

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