Changer c’est grandir

« Muables »,1 et donc libres, nous pouvons changer !

Par nature, hommes et femmes, nous faisons partie des êtres enclins à changer.

Consciemment ou inconsciemment, nous évoluons en permanence.

« Ne vous conformez pas au monde actuel », nous rappelle Saint Paul, « mais soyez transformés par le renouvellement de l’intelligence, afin de discerner quelle est la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait. » (Rm 12, 2)

« Dès ce moment, Jésus commença à prêcher et à dire: «Changez d’attitude, car le royaume des cieux est proche.» (Mt 4, 17)

Le changement : une opportunité pour grandir

Le refus de changer est souvent lié à la peur de l’inconnu. « Un-tiens-vaut-mieux-que-deux-tu-l’auras », dit La Fontaine dans sa fable Le Petit Poisson et le Pêcheur. Certes, c’est là un précepte de sagesse populaire, mais peut-être aussi un frein à notre évolution !

Des changements peuvent être bénéfiques, d’autres malheureux ; mais avons-nous vraiment le choix ? Nous ne sommes pas toujours maîtres des changements que nous vivons. Nous en savons quelque chose dans la traversée agitée de cette pandémie !

Ne pas changer serait-il plaisant ?

« C’est ça qui serait gai, écrivait André Gide, d’avoir toujours en face de soi l’immuable ! Emporté toi-même, à quelle saison de l’an t’en tiendrais-tu ? Celle des boutons ? Ou des fleurs ? Ou des fruits ?.. À quel moment (et même de ta propre vie) oserais-tu dire : nous y sommes ! Ne bougeons plus !» (Journal, 1940).

Ne plus bouger c’est être « mort » ! On voit bien que le changement s’impose à tout ce qui est vivant, et qu’on ne peut arrêter le temps.” me disait MH Martin.

©fp

Face aux tribulations, nous pouvons éprouver le désir de changer, de tendre vers quelque chose d’autre qui nous attire. Changer de travail, changer de maison… Nous avons peut-être rêvé un jour de changer de vie :« Quel esprit ne bat la campagne ? Qui ne fait châteaux en Espagne ? » écrit encore Jean de La Fontaine dans La Laitière et le Pot au lait.

Encore faut-il avoir les moyens du changement ; qu’ils soient d’ordre financier, intellectuel ou cognitif. Quand bien même nous en avons la possibilité, en acceptant de changer, nous prenons le risque de perdre nos sécurités, de contrarier notre entourage, de modifier nos conditions de vie, et aussi d’échouer. Quoiqu’il en soit, le changement provoque une rupture, un abandon ! Il n’est pas toujours simple d’évaluer les avantages et les inconvénients d’un changement. Au pire, l’échec nous ramène à notre situation antérieure, au mieux, nous sommes plus heureux.

Il y a aussi tous les changements que nous ne voulons pas, auxquels nous sommes confrontés, et qui restent cependant inéluctables et parfois nécessaires, comme ceux que nous vivons, à nos dépens, à cause de la pandémie.

« Le serpent qui ne peut changer de peau, meurt. Il en va de même des esprits que l’on empêche de changer d’opinion : ils cessent d’être esprit » disait Nietzsche.

Si nous acceptons un changement difficile, cela nous permet, sans doute, de prendre plus facilement les choses en mains.

« Exister c’est changer, changer c’est mûrir, mûrir, c’est continuer à se créer sans fin » écrivait Henri Bergson.

Alors, voulu ou pas, nous avons sans doute avantage dans notre évolution à accepter le changement.

« Mon Dieu donne-moi la sérénité d’accepter toutes les choses que je ne peux changer, donne-moi le courage de changer les choses que je peux et la sagesse d’en connaître la différence »2

Seul Dieu ne change jamais. Il est immuable (Ap 1, 8).

Hors Dieu, tout est muable ; même ce qui pouvait, en apparence, nous paraître immuable. La vie sur terre, l’univers sont en constante mutation. Notre « muabilité »3 nous offre la liberté de changer.

La « muabilité » est inhérente à notre condition mortelle, sans que ce soit tragique. Cela ne le devient que quand nous voulons résister au destin, au lieu de nous laisser transformer (par l’Esprit).

En nous laissant transformer, nous pouvons alors grandir selon le désir de Dieu.

Le changement : une démarche de foi

« Je laisse le Christ se manifester en moi par l’action de l’Esprit-Saint et je vois le changement » (Ga 2, 20).

La Covid est notre “temps de Noé. Ne le gâchons pas. Pape François

Dans le prologue de son livre « Un temps pour changer »4 le Pape François nous dit :

« Je pense à ce que Jésus dit à Pierre dans l’Évangile de Luc 22, 31 : que le diable veut qu’il soit « passé au crible comme le blé ». Entrer en crise, c’est passer au crible. Tes concepts, tes façons de penser sont bouleversés ; tes priorités et ton mode de vie sont remis en question.

Tu franchis un seuil, par choix ou par nécessité, car certaines crises, comme celle que nous traversons, sont inévitables. »

Et encore :

« La question est de savoir si tu vas sortir de cette crise, et si oui, comment. On ne sort jamais indemne d’une crise ; c’est une règle fondamentale. Si tu t’en sors, tu en ressors meilleur ou pire, mais jamais comme avant. »

Notre Pape nous invite à une dynamique de conversion.

 

Le changement : un privilège des enfants de Dieu

Lorsque nous vivons une conversion, de grands changements se produisent dans notre vie ; notre désir n’est plus désormais de vivre pour nous-mêmes, mais pour Celui qui nous a rachetés à grand prix (1 Cor 6, 20 ;1 Cor 7, 23).

Et Jésus nous entraîne dans sa gloire pour passer du muable à l’immuable « qui transformera notre corps humilié, en le rendant semblable à son corps glorieux par le pouvoir efficace qu’il a de s’assujettir toutes choses. » (Phil 3, 21)

D’ores et déjà, nous recevons en héritage le Royaume éternel (Rm 8, 16-17; Gal 4, 7). « Vos noms sont inscrits dans les cieux » (Lc 10, 20b).

Nous connaîtrons alors la joie d’un changement définitif, le plus important pour chacun de nous !

Claude Turck

1. Qui est susceptible de changement, d’évolution ; qui est libre, donc non immuable.

2. On aurait attribué l’origine de cette prière au temps de Marc Aurèle (121-180), empereur romain et adepte du stoïcisme dont elle reflète l’attitude fondamentale que l’homme devrait avoir face à la vie. Elle a fait l’objet d’une très belle chanson de Claude Valade.

3. Qualité de ce qui est susceptible de changer

4. « Un temps pour changer » Pape François aux éditions Flammarion

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