Témoignage : en mission chez les gens du voyage.

Une mission peu ordinaire pour cet ancien coordinateur diocésain de Fraternité Pentecôte ! 

(Présentation et interview par François Lebon, du Conseil national de FP)

Il s’appelle Robert Touret, il a 62 ans, et a été coordinateur diocésain de Fraternité Pentecôte Cambrai, pendant 6 ans. Il est marié avec Lolita, depuis 32 ans, et ont deux fils. L’aîné, Emmanuel, est marié avec Virginie, et sont parents d’un petit Josué, prénom prophétique, vous allez comprendre par la suite, et de Siloé, née il y … 3 jours ! « Manu » et Virginie sont responsables du groupe de jeunes « Le Buisson Ardent” à Cambrai » (voir ICI). Le cadet, Samuel, vit à Annecy, avec son amie Candis.

Robert est catholique et Lolita est évangélique, issue de la communauté tzigane rom. C’est l’œcuménisme vécu au quotidien ! En avril 2024, Mgr Vincent Dollmann, archevêque de Cambrai, a institué Robert lecteur et acolyte parmi le peuple des gens du voyage, dans le cadre de leur aumônerie catholique nationale.

Rome Jubilé d’Or 2017

Son itinéraire est étonnant. Robert Touret était un jeune, mal dans sa peau, en grande instabilité. Mais il découvre les groupes de prière du Renouveau Charismatique. Il vit le baptême de l’Esprit-Saint dans le bureau de son patron, en priant avec lui ! À 23 ans, il participe à une mission d’évangélisation durant laquelle il accepte d’aller témoigner auprès des gens du voyage catholiques ; c’est un coup de foudre ! Il décide de répondre à l’appel à devenir missionnaire, de vivre en caravane, de travailler aux petits métiers, bref de s’intégrer auprès du peuple tzigane ; et ce sera parmi la communauté rom qu’il rencontre son épouse Lolita, évangélique comme beaucoup dans cette communauté. (Feu Mgr François Garnier disait de Lolita : “J’imagine le paradis avec tous les anges chantant en langue comme Lolita !”). Robert trouve la paix et la stabilité. Il y découvre un grand respect pour les anciens et l’importance de la famille. Des moments conviviaux ! Quand leurs enfants grandissent, le couple décide de revenir en maison individuelle pour plus de stabilité mais ils restent en lien avec leurs amis du voyage, dont la grande famille de Lolita ; il aime ces rencontres dans les maisons, sur les terrains, dans les caravanes où l’on se retrouve pour des moments conviviaux : chants, partage d’Évangile, prière, pot de l’amitié.  C’est donc tout naturellement, en accord avec Lolita, que Robert accepte cette nouvelle mission au service de la parole de Dieu (lecteur), de la prière et de l’Eucharistie (acolyte).

Robert, peux-tu nous parler de cette communauté tzigane rom ?

Ce monde est inconnu ! Les médias et les politiques n’en ont qu’une connaissance très partielle, déformée ou caricaturale, « des voleurs de poules » ! C’est un milieu avec ses dialectes, ses us et coutumes et n’y entre pas qui veut ! Pour moi, c’était de l’ordre du miracle ! J’y ai vécu ma jeunesse, puis ma vie d’adulte, au point de me marier avec Lolita ! Et je suis pour eux « Robertino » !

Tu as mis en place des « assemblées Jéricho », qu’est-ce à dire ?

J’ai toujours était très touché par Josué, 6 : les murailles de Jéricho. Or, comment abattre les murailles qui sont en nous et autour de nous ? Par la puissance de la louange, par la puissance du Saint-Esprit. Elles sont nombreuses ces murailles, très nombreuses !

Avec de Gaulle, c’était « les français parlent aux français », chez nous, c’est « les chrétiens parlent aux non-chrétiens ! ». (Rires) …

Ma première préoccupation a été de créer des ponts entre les gens du voyage eux-mêmes car entre les évangéliques et les catholiques il y a beaucoup de méfiance. J’ai souhaité aussi créer des ponts entre gens du voyage et sédentaires, faire se rencontrer des gens qui se croisent sans se rencontrer. Jéricho, c’est faire tomber les murailles !

Concrètement, comment se déroulent les « assemblées Jéricho » ?

Ces soirées sont très sobres. Pas de scène, pas de rampes lumineuses, pas de spots, pas de « grosses pointures », pas de grands noms. On y vient pour rencontrer Jésus, pas les hommes… C’est à l’image de Lolita et de moi-même, de notre vie : très simples ! Ce sont des soirées d’évangélisation et de fraternité.

Avec Lolita, nous avons choisi de lancer ces rencontres « hors cadre » . Où l’on retrouve des paroissiens catholiques, des évangéliques, des pentecôtistes, des gens du voyage et même des musulmans ! Lors d’une soirée, on a vu un couple de médecins chirurgiens côtoyer un ferrailleur. Un mec qui a connu les cambriolages, les braquages. Il est venu avec toute sa famille ! Nous sommes allés les chercher sur leur terrain ! Le matin de la rencontre, je vais avec plusieurs frères sur le marché de Cambrai pour inviter. Au moyen d’une sono, nous allons annoncer la Parole de Dieu et donner notre témoignage. Mon ami Roland, un ancien toxicomane converti, un aventurier, chanteur et musicien, auteur-compositeur interprète ses chants. Tout cela constitue une communauté auprès de laquelle je me sens très proche, avec de bons contacts. Il peut y avoir des prêtres et des pasteurs ! Ce sont réellement des réunions atypiques. Vous vous rendez compte que cette vision dérange, déstabilise !

Il y a du combat spirituel, j’imagine ?

(Rires) Oh oui ! On m’a accusé de vouloir détourner les catholiques vers les églises évangéliques, et, à l’inverse, de détourner les chrétiens protestants vers l’Église catholique ! On m’a reproché de faire concurrence aux mouvements, aux services existants. On m’a même traité d’islamiste, de gauchiste, de vouloir détruire l’Église ! Ma mission est tellement atypique ! Les gens ont peur et se méfient de l’inconnu, des inconnus !

Tu y donnes ton témoignage ?

Oui, j’ai remarqué qu’il touchait des personnes très éloignées de l’Église. Dans mon parcours de vies, je dis « vies » au pluriel car j’en ai eues plusieurs (rires), je suis passé des ténèbres à la lumière, de la mort à la vie. Dans ma jeunesse, j’ai fréquenté des groupes charismatiques œcuméniques, je suis revenu à l’Église catholique, tout en vivant une expérience de conversion dans une Église évangélique africaine, alors que je me trouvais au fond du gouffre .…

Peux-tu évoquer la dernière soirée Jéricho ?

Sont venus des gens qui sortaient de nulle part et que nous n’avons pas l’habitude de croiser dans nos églises : hommes, femmes, jeunes et enfants, tous mes cousins par alliance ! (rires). Une assemblée disparate, une diversité culturelle et confessionnelle, mais Jésus a transformé leur vie ! L’Eglise ADD (Assemblée De Dieu) était bien représentée. Le pasteur Karim, avec deux sœurs de sa communauté de l’Église baptiste évangélique, est venu. Il y avait très peu de catholiques mais un certain nombre de gens du voyage, avec femmes et enfants et même un gitan espagnol. Le Père Jean-Marie Moura, aumônier des gens du voyage, était, bien sûr, présent.

J’ai tenu à accueillir ce groupe dans la langue rromanès. (NDLR : appelée aussi rromani, macro-langue indo-aryenne originaire du nord de l’Inde). La louange était animée par Franz et Cécile, et Manuel Luiz, secondé par Isabelle.

Après avoir partagé une partie de mon témoignage de vie, nous avons eu la grâce d’entendre des témoignages renversants de jeunes roms qui sont devenus chrétiens, des cantiques improvisés de très haute qualité et une prédication du frère Marco en rromanès, traduite en français. Le message, inspiré par l’Esprit, était centré sur la Croix : venir à la Croix pour recevoir le pardon, la guérison, la libération. Des paroles fortes ont retenti dans l’église Saint Roch, pour un homme qui a appris à lire dans sa Bible ! Puis un temps de prière des frères, animée par les anciens du groupe de prière, clôturait cette soirée extraordinaire. Pour la plupart, c’était la première fois qu’ils entraient dans une église catholique !

Une expérience unique, qui m’a fait découvrir qu’il n’est pas facile de faire se rapprocher des gens qui se croisent sans vraiment se rencontrer …

Tous les participants à cette soirée ont été très touchés par ce qu’ils ont vu et entendu. Certains ont reçu des grâces particulières. Merci Seigneur !

Dernière question Robertino (rires), comment Lolita et toi vivez les charismes dans cette étonnante mission ?

Je suis et reste, en quelque sorte, un enfant du Renouveau ! L’Esprit de Dieu m’a conduit à servir ce peuple que je connais depuis plus de 40 ans. J’ai vécu des évènements heureux et douloureux parmi mes frères. Les grâces que j’ai reçues dans le Renouveau Charismatique, j’ai le devoir de les diffuser dans ces communautés, pas seulement catholiques, mais aussi évangéliques.

Si j’ai reçu l’appel à devenir lecteur et acolyte, peut-être diacre pour ce peuple, c’est aussi le souhait de mon archevêque d’avoir une visibilité dans les paroisses, disons sédentaires. Ceci pour faire le lien. J’ai découvert, en collaboration avec l’aumônier des gens du voyage, le père Moura, un peuple en abandon spirituel, avec une soif de Dieu et du Saint-Esprit très réelle. Un peuple qui désire découvrir toujours plus : sur le Saint-Esprit, ses dons, ses charismes. Tous y sont très sensibles. 

J’exerce essentiellement les charismes de la Parole, lors des célébrations de baptême, lors des réunions de prière, de façon improvisée, conduit par le Saint-Esprit. Nous sommes appelés, Lolita et moi à prier pour les malades en leur imposant les mains, au nom de Jésus. Nous commençons, lors des réunions de prière à initier les participants au chant en langue et à recevoir d’autres charismes. On s’adresse à des gens qui vivent l’imprévu par leur mode de vie, échappant aux cadres établis, aux structures ; ils sont donc entièrement disposés à recevoir l’Esprit-Saint.

Dans une chambre d’hôpital, nous avons prié pour une femme malade. Nous étions 7 personnes et le chant en langues est monté dans ce lieu. Ce fut une prière puissante, avec des visions, une prière vraiment inspirée.

Une autre fois, à l’abbaye d’Ourscamp, une jeune femme demande la prière au Père Abbé, qui fait appel à Lolita et moi qui passions par là, ainsi qu’à un frère de l’Emmanuel. Nous avons commencé à prier pour cette personne. De façon mystérieuse, nous avons vu arriver une famille, puis 2, puis 3, et enfin 4 ! Des enfants, des jeunes, des vieillards. Le plus âgé avait plus de 80 ans. Cette pièce s’est transformée en chambre haute, en cénacle. Des cantiques, des chants en langues, des paroles de connaissance sont montés vers le Ciel. Tous, sans exception, ont alors demandé la prière. Un grand moment de Pentecôte s’est vécu là, un moment inoubliable !

N’est-ce pas l’Eglise primitive ? Forts de ces expériences, nous continuons dans cette dynamique, témoignant à tous des merveilles que le Seigneur fait dans nos communautés des gens du voyage et tziganes. 

Je pressens un grand réveil. J’en ai la certitude. Le Saint-Esprit agit davantage parce que le temps organisé, structuré n’existe plus guère. Alleluia ! Amen ! 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

2 Commentaires

  1. Contente d’avoir lu cet article : il m’a permis de te connaître encore un peu plus Robert. Je suis reconnaissante de te connaître. Votre mission est merveilleuse

Répondre à Millet -Gosselin Hélène Annuler la réponse

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