“Le combat spirituel, clé de la paix intérieure”
Livre du Père Joël Guibert
Notes de lecture Françoise Reinberger (en 3 parties)
1°partie (1/3)
Pour entrer dans la paix du cœur, il faut se préparer à la guerre, surtout à notre époque du « tout tout de suite » et « tout est permis » qui conduit à l’individualisme, la jouissance, la violence, la dépression.
- Ce combat n’est pas le vôtre mais celui de Dieu
– Nous sommes créés pour le bonheur, et il nous appartient d’y collaborer ; le combat spirituel est une immense miséricorde que Dieu nous offre afin de pouvoir nous accorder librement et volontairement à Sa Vie et à Sa Joie divine.
– blessés par le péché, il nous revient d’agir pour notre guérison ; Dieu ne nous sauvera pas sans nous. Le Catéchisme de l’Église catholique (CEC) : « la vie nouvelle reçue dans l’initiation chrétienne n’a pas supprimé la fragilité et la faiblesse de la nature humaine, ni l’inclinaison au péché que la tradition appelle concupiscence, qui demeure dans les baptisés ». Le combat spirituel est un travail de détachement et de purification.
– le combat spirituel et le développement personnel ne sont pas le même combat ; le développement personnel renforce cet individualisme tyrannique ; le combat spirituel libère l’homme d’un amour démesuré de soi ; Dieu à mon service ou moi au service de Dieu ? évitement ou accueil de la croix ? la vie dans l’Esprit ne consiste pas d’abord dans la santé, mais dans la sainteté.
– la vie de Dieu en nous : la grâce divine est vivante et agissante en nous ; Saint Augustin : « Dieu ne commande pas des choses impossibles, mais en commandant, il avertit de faire ce que l’on peut, et de demander ce que l’on ne peut pas faire ». Le baptême nous rend capables de croire, espérer et aimer, les trois vertus théologales. Le péché mortel fait perdre la grâce sanctifiante. Le CEC : « les sept dons du Saint Esprit sont des dispositions permanentes qui rendent l’homme docile à suivre les impulsions du Saint Esprit ». Saint Paul considère la vie à partir de l’Esprit comme le fondement de la vie chrétienne et du combat spirituel.
- Les secours de la grâce de Dieu
Dieu met gracieusement à notre disposition les secours pour vivre de lui et faire face aux situations les plus déstabilisantes de l’existence. Saint Paul : « il ne permettra pas que vous soyez tentés au-delà de vos forces » (Col 10,13).
– « ma grâce te suffit » : se laisser prendre par la grâce de Dieu ; la guerre spirituelle n’est pas d’abord la nôtre mais celle du Christ agissant en nous ; nos luttes au quotidien sont une participation au combat spirituel du Christ ; soit je décide de ne pas mener le combat et je serai ballotté, dans l’amertume, soit je décide de me battre avec mes propres forces et je m’épuise et me dessèche, soit je décide de mener le bon combat et j’apprends à laisser Jésus combattre en moi et avec moi, et la puissance divine se déploie au cœur de la faiblesse ; « ceux qui espèrent en Dieu renouvellent leur force » (Isaïe 40, 31). La grande conversion du chrétien est de se laisser prendre par Dieu.
La prière « télécharge » Dieu en notre âme ; dans l’oraison prolongée, Dieu se livre sans réserve ; la prière fidèle guérit petit à petit notre affectivité, procure un repos profond, et soigne la tendance au stress.
– réconcilier vie morale et vie spirituelle
– réconcilier vie morale et vie théologale ; on ne peut pas vivre selon Dieu sans vivre de Dieu ; la vie théologale est la colonne vertébrale de notre combat spirituel
– croître à partir de la grâce de Dieu : posons un regard de foi et de confiance sur la vie du monde et de l’Église : le désordre du monde n’aura jamais le dernier mot, les portes e l’enfer ne prévaudront pas contre l’Église ; développons le sens du mystère : Pape François : « savoir avec certitude que celui qui se donne et s’en remet à Dieu par amour sera certainement fécond… la personne est sûre qu’aucune de ses œuvres faites avec amour ne sera perdue… il n’y a pas de plus grande liberté que de se laisser guider par l’Esprit en renonçant à vouloir calculer et contrôler tout, et de permettre à l’Esprit de nous éclairer, de nous guider, de nous orienter, et de nous conduire où il veut ».
– espérer à partir de la grâce de Dieu n’est pas l’optimisme béat, ni le « pas de vague » qui est une fausse espérance.
– La grâce est accessible en cascade
– l’Église est fontaine de la grâce de Dieu ; « jamais sans l’Église mon épouse » ; Jésus est l’époux et l’Église sa divine épouse (composée de pécheurs) ; l’Église est une grâce mais aussi une épreuve pour le combat spirituel ; notre confiance en l’Église repose d’abord sur la fidélité de Dieu envers son épouse.
– l’Église est nourriture pour la route ; à travers la Bible, c’est Dieu qui nous parle ; lorsque Jésus est tenté au désert, il répond par des paroles de la Bible.
– les sacrements, force de Dieu qui nous livre Dieu lui-même, sa vie de ressuscité ; laissons nous transfigurer par l’eucharistie, laissons nous guérir par le sacrement de réconciliation.
– les sacramentaux : médaille miraculeuse, prière à la Reine des anges, à Saint Michel…
- La tactique du diable
Les 3 adversaires : le monde, le diable, la chair
– Satan est comme un chien attaché qui aboie ; Satan est vraiment le tentateur : « résistez lui, fermes dans la foi » (1P 5, 8-9) ; Jésus est vainqueur du monde, le démon n’est qu’une créature, créée par Dieu et qui s’est détournée de Dieu.
– le démon, notre tentateur : Satan ne peut pas agir directement sur notre volonté ; il peut agir directement par les sensations ou par l’imagination (par les suggestions qui nous traversent l’esprit).
– les costumes du diable : il fait croire que l’accumulation de péchés véniels est sans importance mais ceux-ci font glisser vers les péchés mortels, et détournent de la confession personnelle au profit de la confession collective, ou cacher son péché à la confession. En fait, l’aveu n’est pas humiliation mais libération (comme se libérer d’une arête au travers de la gorge).
– Il est menteur et maître du soupçon ; on ne fait pas le poids dans le dialogue avec le diable ; son scénario : la flatterie de l’égo par l’orgueil, le plaisir de la possession et un doute subtil sur les intentions de Dieu ; il s’ensuit que l’homme se soupçonne lui-même, et cela conduit à l’autodestruction.
– il est le champion du découragement ; on ne supporte pas d’être imparfait, on ne se pardonne pas, et au bout c’est le découragement, l’accablement, et au bout la désespérance qui est péché contre l’esprit, qui n’accepte plus de se laisser sauver par le Rédempteur.
– il est le diviseur. Saint Augustin : « tu vois la Trinité quand tu vois la charité » ; avec Satan, c’est l’opposé, c’est l’anti-amour ; Paul VI : « la fumée de Satan est entrée dans le peuple de Dieu ; nous voyons le doute, l’incertitude, l’insatisfaction, l’affrontement… le doute est entré dans les consciences ».
- « Ne nous laisse pas entrer en tentation »
La tentation épreuve ou la tentation séduction
– la tentation épreuve est permise en vue d’un bien, et la tentation séduction est provoquée en vue d’un mal ; Dieu peut permettre dans nos vies la tentation épreuve dans un but d’affermissement et de croissance spirituelle ; la tentation séduction, Dieu ne peut jamais la provoquer car elle a pour but de faire sombrer l’âme.
– la tentation endurcissement : elle installe dans l’enferment définitif, loin de Dieu, c’est « le péché contre l’Esprit », le refus d’être sauvé ; la tentation ultime est le reniement, et ce, de l’apostasie personnelle à l’apostasie généralisée (après le Notre Père à la messe, il y a la prière « fais que je demeure fidèle à tes commandements et que je ne sois jamais séparé de toi »).
Des bienfaits de la tentation épreuve
– Elle procure une connaissance plus lucide sur nous-même et sur nos limites, elle accroît notre humilité et elle accroît la vertu, et approfondit la vie dans l’Esprit.
– lorsque se présente une contradiction, une épreuve ou même une tentation, ne récriminons pas contre le ciel mais voyons une occasion favorable pour une plus grande lucidité sur soi, une plus profonde humilité dans la vérité et une élévation spirituelle et unité intérieure.
L’échographie de la tentation séduction
Le mécanisme de la tentation : après de nombreuses tentations consenties, on sombre peu à peu et notre conscience morale s’érode.
– à la racine il y a le désir : la tentation s’enracine dans le désir qui n’est pas mauvais en soi
Si on regarde la tentation à la loupe : depuis la faute d’Adam, notre nature s’est trouvée désunie et nous sommes tiraillés entre les forces du bien et les forces du mal ; le processus est le suivant : des sens à l’imagination, de l’imagination au désir, et du désir mauvais à l’acte pécheur.
Les sens : ils sont comme des fenêtres qui nous ouvrent sur le réel (par exemple si la sensibilité est flattée et elle ouvre à la tentation d’orgueil)
L’imagination : elle est en lien avec le sensible (par exemple une impression peut déboucher sur une colère, une image peut pousser à une tentation charnelle, un souvenir passé peut conduire à une chape de tristesse…) ; l’imagination développe des scénarios, les tricote, les gonfle… et les tentations vont être décuplées par notre imagination ; si on ne coupe pas court à ce cinéma intérieur, on va acquiescer et succomber ; du désir mauvais, on bascule dans l’acte mauvais.
– il y a trois phases : la suggestion, la délectation et le consentement
La suggestion qui n’est pas péché ; sentir n’est pas consentir (Catherine de Sienne disait que même avec la violence d’une tentation charnelle, il n’y a pas péché)
La délectation : c’est l’émotion parfois violente que la suggestion provoque « la chair convoite contre l’esprit », « il y a une loi des membres et une loi de l’esprit » Saint Paul
Le consentement : l’âme acquiesce volontairement à la suggestion mauvaise et s’y complaît, il y a véritablement péché ; Matt 5, 28 : « Moi je vous dis que quiconque regarde une femme pour la désirer a déjà commis dans son cœur l’adultère avec elle » ; lorsque l’âme regarde la femme pour la désirer, il y a consentement volontaire à la suggestion mauvaise, et il y a péché.
Un premier mouvement de colère n’est pas encore péché mais une réaction sensible de la nature ; ce « coup de sang » devient péché lorsqu’il est entretenu et se transforme en ressentiment.
Pour ne pas tomber dans le scrupule, il convient de cultiver beaucoup l’humilité car souvent l’orgueil entraîne les scrupules.
– Connais-toi toi-même
Satan sait adapter sa tactique en fonction des dispositions intérieures de l’âme et a la capacité de repérer les points faibles et les qualités de sa proie ; c’est pourquoi il est important de se connaître dans la connaissance de Dieu, de repérer nos points faibles et fragilités, mais aussi nos qualités et autres charismes – qui peuvent devenir un piège si j’en viens à me les approprier.
– Quelles sont mes dispositions intérieures profondes ?
Vis-à-vis d’âmes installées dans le péché ou la tiédeur, le démon leur fait imaginer des jouissances et des plaisirs des sens pour mieux les conserver et les faire croître dans leurs vices et leurs péchés ; à l’inverse, l’Esprit Saint sait « les aiguillonner et mord leur conscience par le jugement moral de la raison » (Saint Ignace).
Vis-à-vis des personnes qui s’efforcent de progresser dans la loi du Seigneur, dans l’amour de Dieu et du prochain, le mauvais esprit mord, attriste, et met des obstacles et inquiète pour de fausses raisons pour qu’ils n’aillent pas plus loin ; « l’Esprit Saint lui, donne courage et force, consolations et quiétude, rendant les choses faciles et en écartant tous les obstacles pour qu’ils aillent plus avant dans la pratique du bien ». Aussi connaître l’orientation profonde de notre cœur – recherche du bien ou laisser aller -, est décisif pour discerner l’origine maléfique ou divine des mouvements intérieurs qui nous traversent.
– Quelles sont mes failles, mes fragilités ? l’ennemi va attaquer nos points de fragilité
Celui qui est facilement enclin à la tristesse, le malin se chargera de le tenter par le désespoir ; à celui qui a souvent peur de manquer, le démon l’invitera à capitaliser et même à voler , espérant ainsi le sécuriser faussement ; Mère Teresa : « le malin ne vous invitera jamais à prendre quelque chose de gros, mais le jour suivant un peu plus… » ; celui qui aspire à être reconnu, il l’encouragera à travailler, et même à très bien travailler mais uniquement dans le but d’obtenir des louanges sur son savoir, sa réussite sociale, ou l’étalage de ses richesses.
– Veiller au bon usage de nos dons et de nos ferveurs
Lorsque le démon ne réussit pas avec nos points faibles, il attaque nos points forts, qualités et charismes ; il est capable de favoriser nos qualités et autres charismes pour que, parvenus à un certain niveau de gloire, nous tombions dans la gloriole ; dans notre conquête de la vertu, dans notre générosité apostolique, tout peut sembler pour la gloire de Dieu, sauf qu’un petit ver peut s’immiscer en nous : le désir du succès finit par corrompre notre service ; l’âme ne se reçoit plus de Dieu et s’atrophie ; la gloire qui revient à Dieu et la vie spirituelle ou la mission pourrissent ; « la grande richesse, c’est d’être pris par l’Esprit Saint, d’être transformés par l’Esprit » (Père Marie Eugène de l’Enfant Jésus). Exemple du Père Tardif immobilisé à l’hôpital : le Seigneur lui a fait comprendre qu’il était plus utile là où il était plutôt que de prêcher à travers le monde.
Dieu crée la docilité par la pauvreté spirituelle ; les évangélisateurs porteurs d’une véritable fécondité divine, sont marqués par les humiliations, les croix, la pauvreté : une écharde divine pour qu’ils demeurent suspendus à la grâce divine, parfaitement convaincus que tout leur vient de Dieu ; il faut sentir sa pauvreté pour appeler Dieu ; Dieu crée en ces âmes la docilité par la pauvreté, il en fait des mendiants pour les rendre dociles.
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