Notre-Dame du Laus 2023 :
le témoignage de Frère Daniel-Marie
(Transcrit par Marie-Hélène Martin)
Le Frère Daniel-Marie présente d’abord deux de ses livres.
“Les charismes pour tous”. Si vous l’avez déjà, achetez-le pour l’offrir à quelqu’un ! Le suc de ce livre, et je voudrais que nous soyons tous capables de l’accueillir, c’est que notre vie est magnifique ! Est-ce que tu peux dire : ma vie est magnifique ? Cela brise plein de paroles de malédiction : j’aurais dû mieux faire ci ou ça, le Seigneur s’en moque. L’important c’est que tu agisses maintenant en lui. À partir de ta vie tu peux obtenir et grandir dans tous les charismes.
Le 2e bouquin, c’est “En route vers la guérison”.
Il explique comment prier pour la guérison, et il donne plein de trucs, des conseils. Quand vous allez voir un thérapeute, il y a des conseils à suivre ; il faut voir sur quoi il s’appuie. Il faut peut-être être plus ouvert que vous ne l’êtes. Mais évidemment s’il s’appuie sur des idéologies qui ne sont pas celles de Jésus Christ, on balance ! Il y a aussi des prières à la fin.
Si je reprends mon histoire d’hier1, pour faire le pont avec mon enseignement d’aujourd’hui, c’est parce qu’avec toute l’équipe on veut vous entraîner dans une plus grande confiance que l’Esprit Saint est en nous et qu’il veut déborder de nous.
Tout ce que nous avons vécu dans notre vie est archi-précieux, même les échecs ; peut-être même surtout les échecs ! N’oublions pas que c’est par les plaies de Jésus que nous sommes guéris.
Témoignage de Frère Daniel-Marie
Je suis franciscain, je vis à Bruxelles. C’est toujours délicat de donner son témoignage, mais ce que je voudrais faire, c’est que nous activions notre mémoire, pour une guérison de notre mémoire. Parce que l’accusateur est toujours là pour me dire : tu vois, ça, ça n’a pas marché dans ta vie et comme il n’arrête pas, tu en arrives à te recroqueviller sur ta coquille, à ne plus croire que Dieu est tout puissant, et au fond de toi il y a beaucoup d’amertume. Et ce soir je veux dénoncer ce mensonge. Dieu nous a donné une mémoire pour que nous fassions mémoire de ses bienfaits, de sa Parole. En vous racontant mon histoire je voudrais que vous puissiez réactiver votre mémoire, parce qu’il a un plan d’amour pour chacun d’entre nous, et il va le réaliser. Rien ne peut empêcher cela. Faites aussi descendre cette bénédiction sur vos familles, enfants, petits-enfants…
1) Quand j’étais gamin, je jouais à la messe avec ma petite sœur – elle était un peu jalouse, parce que c’était toujours moi le prêtre ! Après elle s’en est remise, avec ses 4 enfants et ses 13 petits-enfants. Je fais mémoire d’elle aussi, c’est ma meilleure amie ! À 10 ans, à la fin de la messe, je trouvais le prêtre tellement rayonnant du bonheur d’être prêtre que j’ai dit à ma mère :« maman, plus tard je veux être prêtre ». Elle me regarde, très étonnée, et me répond cette phrase historique : « ah bon ? » parce qu’elle ne s’y attendait pas du tout. Je peux vous dire que l’Esprit Saint nous connaît bien mieux que nous ne nous connaissons nous-même (cf. St Augustin). Pendant longtemps je l’ai oublié ! À 12 ans je rencontre un pasteur pentecôtiste, qui me demande : « tu veux faire quoi, plus tard ? – plus tard, je veux être prêtre ». Il me ressort cette phrase historique : « ah bon ? » Je n’en parlais à personne parce que je n’avais pas éveillé la mémoire de mon cœur. Mon cœur le savait, mais pas ma tête. Ton cœur sait plein de choses dont ta tête n’a pas conscience. Même si tu as 99 ans, il y a dans ton cœur des choses qui ne sont pas encore conscientisées dans ta tête. Que toutes les promesses que Dieu a faites dans ta vie remontent jusqu’à ta conscience, pour que tu puisses les mettre en œuvre !
À l’âge de 15 ans (en 1973) je suis depuis un an déjà un militant communiste révolutionnaire, et j’ai encore ce feu de générosité qui a embrasé – mal embrasé – toute une génération en 1968 ; ce pendant 3 ans. Je rentre dans mon lycée, à Lyon ; je vais voir direct le prêtre que j’ai repéré dans la cour et je lui dis : « bonjour ! je suis marxiste révolutionnaire, et plus tard je veux être prêtre ». On est merveilleux à 15 ans ! Faites mémoire de cet élan que vous aviez en vous à l’âge de 15 ans ! Restaurez ces énergies magnifiques, et on en a encore plus maintenant, puisque la parole nous dit qu’à mesure que l’homme extérieur va vers sa ruine, l’homme intérieur se renouvelle de jour en jour ! Et c’est ça qui rayonne à l’extérieur de nous. Mais tout ça, je l’oublie. Le diable a créé les gommes, pour que nous ne nous souvenions pas des bonnes choses et que nous nous souvenions des mauvaises. Il n’a pas accès à nos pensées, mais à notre imagination, notre mémoire, notre sensibilité. Et quand il nous touche par là, il va ensuite activer nos pensées dans le mauvais sens. Il faut que nous arrêtions définitivement de réagir à partir de nos sensations, nos émotions, il faut que nous activions notre intelligence à partir des bonnes choses que Dieu veut nous rappeler.
De 15 ans à 18 ans, je suis un désastre à l’école, parce que je suis avant tout un militant révolutionnaire, avec quelques autres ; je réussis mon bac par grâce, mais je perds cet idéal, je m’aperçois qu’il est creux à l’intérieur, cet idéal de la révolution socialiste, où tout d’un coup tous les gens seraient égaux, au prix des quelques millions de personnes qu’on a tuées au passage, c’est pas grave, après on sera tous heureux… Je m’aperçois qu’il y a quelque chose qui cloche. Donc je lâche ce mouvement ; je quitte la faculté, je vais vivre avec des copains et des copines, et pendant 3 ans je vais vivre une descente aux enfers, où le Christ viendra me rechercher (comme il est dit dans le credo) par la puissance de sa croix et de sa résurrection, même à un moment où je ne l’avais pas encore connu. Drogue, délinquance : 4 hold-up à main armée en l’espace de 3 ans, dans des banques ou bureau de poste. Comment est-ce que j’ai pu être aussi con ? Elle était où, ma conscience ? Comment est-ce que j’ai pu vivre de cette façon-là pendant 3 ans ? On peut expliquer : la drogue… l’idéologie anarchiste… Ce dont je veux me souvenir, c’est la miséricorde de Dieu, dont je peux faire mémoire éternellement : dans ces moments les plus difficiles, l’Esprit Saint est passé pour que je ne me fracasse pas. Appliquez cela à vos familles, vos enfants, petits-enfants… Si vous êtes en souffrance pour un enfant, un petit-enfant, qui lui aussi est en train de délirer complètement, réalisez cette mémoire de l’espérance certaine, que Dieu est en train d’agir puissamment dans leur vie, en ce moment ! L’Esprit Saint a été là pour m’éviter le pire, de me flinguer, de flinguer des gens, de faire une overdose. À 21 ans je suis découvert par la police. Alors là je découvre merveilleusement mon père. Mon père était haut fonctionnaire à la préfecture, et quand il apprend que la police me recherche, il est effondré, il est détruit. Il se dit : qu’est-ce que j’ai raté ? Au risque de sa carrière, comme il a vu que ce n’était pas la peine de me raisonner, il m’a dit : quand les grands caïds sont repérés, ils te plantent, alors il faut que tu te planques. Il a loué une bagnole pour que je puisse me planquer, passer la frontière et entrer en clandestinité en Italie. J’y ai été SDF pendant 10 ans. Voyez comment l’Esprit Saint travaille : j’ai redécouvert la paternité, et aussi la maternité, celles de mes parents, celles de Dieu. Là aussi il y a guérison de nos mémoires : tout ce que nos parents n’ont pas su faire, Dieu l’a fait, parce qu’il est un vrai papa, une vraie maman, et j’ai aussi une maman avec Marie.
De l’autre côté de la frontière italienne, j’ai à peine un gros pull, c’est à peu près tout, je suis dans un parc public, je me couche, et au moment de me coucher, au milieu des cacas de chiens, tout à coup j’entends une voix intérieure qui me dit : « maintenant, Daniel, tu es seul ». Je comprends que tout ce que j’avais construit de factice, comme fausse sécurité dans ma vie, n’existe plus : les copains, la bagnole, les flingues, la drogue… L’Esprit Saint te dit toujours, que tu sois croyant ou pas croyant, il te dit toujours dans le fond de ton cœur la petite chose qui va te servir maintenant. « Maintenant, Daniel, tu es seul » : c’est une phrase qui ne veut rien dire en soi, mais en me disant cela l’Esprit Saint savait très bien qu’il y avait quelque chose qui allait s’écrouler dans ma vie. Ça veut dire : eh, il faut que tu réagisses ! C’était comme un coup de tonnerre. Ma réaction, ça a été : je vais me mettre à travailler. Je retrouve des valeurs que mes parents m’avaient apprises. Je pars en direction de Rome, j’arrive à Florence. Je cherche du boulot, je vis avec les SDF, je suis un SDF. Je mange du pain, je bois de l’eau, je partage avec les pigeons, mes seuls copains, je dors dans des cartons, pas trop près, pas trop loin des autres, c’est compliqué… Je trouve du boulot pour quelques mois, vendre des disques ; je parle très bien italien parce que c’est une des rares choses que j’avais bien étudiées à l’école, là encore je vois que la providence est extraordinaire. Regardons notre histoire avec ce regard de la bénédiction de Dieu sur nous ! Il faut tenir bon ! Mes parents ont tenu bon pendant 10 ans, ils ont souffert, ça a été terrible pour eux. Mais dans ces deux mois de travail, ce qui m’a tenu c’est l’action de l’Esprit Saint. Tes vaisselles quotidiennes t’emmèneront au paradis ! Ton ménage quotidien t’emmènera au paradis ! Le fait que tu laves ta tasse de café tous les jours t’emmènera au paradis ! Le fait que tu laves tous les jours la tasse de café de ton mari t’emmènera au paradis ! Notre travail au quotidien est l’oeuvre de l’Esprit Saint, et petit à petit, il creuse en nous cette place que Dieu occupe de plus en plus. Ensuite je suis allé à Milan, où j’ai aussi trouvé du travail ; cette locution intérieure, « maintenant, Daniel, tu es seul », m’a tenu pour que je puisse continuer à bosser, alors que j’aurais pu reprendre ma sale vie. Cette parole de Dieu a été une parole créatrice. Pendant 9 mois, j’ai parcouru toute l’Italie pour une entreprise de vente en faisant du porte-à-porte, un truc que je m’étais juré de ne jamais faire. Le problème c’est que quand je rentre à Milan, je n’ai pas d’idéal de vie, je ne sais pas à quoi sert la vie. Si tu veux sauver la vie de quelqu’un, demande-lui : qu’est-ce qui te rend vraiment heureux ? Et il n’y avait personne pour me poser cette question. L’urgence c’était de bosser ; et souvent, on ne voit pas plus loin que le pas suivant. Mais quand tu marches, tu ne sais pas où elle va, ta vie ; il faut aller plus loin, faire le pas suivant, le pas qui est éclairé par le phare qui est au loin, qui de temps en temps éclaire et de temps en temps s’éteint. Avec ta lampe-torche tu ne vois pas très loin, mais assez pour faire le pas suivant. C’est ce pas qui te guide. Et lorsque tu fais mémoire des pas précédents, tu es en train de tracer en pointillés une ligne droite où Dieu est en train de t’emmener vers quelque chose que tu ne connais pas encore, mais que tu es en train de suivre. Comme je gagne bien ma vie et que je ne sais pas quoi en faire, je partage… la drogue, l’héroïne. L’héroïne me conduit pour deux mois à l’hôpital, et là je me pose.
2) J’en étais au point où j’étais à Rome sans permis de séjour, sans travail, recherché par la police en France, inconnu en Italie ; et j’arrive à passer à travers les mailles en travaillant, grâce à une petite parole de l’Esprit Saint – et l’Esprit Saint il les dit à tout le monde, ces paroles ; mais je l’ai conscientisé beaucoup plus tard, sur le moment je n’ai pas compris que c’était l’Esprit Saint, je n’ai même pas conscientisé que c’était une voix. Après, lorsque nous nous posons, Dieu nous donne la capacité de relire notre vie, nous arrivons à comprendre. À Rome, après 2 mois d’hôpital, pour une double hépatite virale (la B et la C), je suis hébergé pendant 2 ans chez des jeunes. Et là j’apprends la fraternité, j’apprends la pauvreté, j’apprends la chasteté ; ce sont des frères et des sœurs, des cousins et des cousines, qui vivent ensemble dans deux pièces dans un sous-sol. Ils sont très pauvres, ils vont bosser mais moi je n’ai pas de permis de travail. Alors j’apprends à faire les pâtes italiennes (je suis imbattable !), à faire les courses avec pas d’argent, pour faire à manger pour 7 personnes… Vraiment des personnes magnifiques, j’ai tellement appris de ces gens, des Calabrais émigrés du Sud de l’Italie à Rome. Et là, mon cœur, comme le cœur de tout homme et de toute femme, cherche Dieu mais ne le sait pas ; et donc je me mets à le chercher dans plein de bouquins, astrologie, magie, tarot, franc-maçonnerie, ésotérisme oriental… Tout ce qu’il ne faut pas, mais je ne sais pas que c’est mauvais, et Dieu est tellement merveilleux qu’il est capable de tirer de là-dedans le 1/1000e de vérité qui s’y trouve. Parce que vous connaissez la tactique du diable : c’est partir d’une bonne chose, pour la faire devenir mauvaise. Dieu part de là pour m’emmener vers une connaissance et une conscience plus grandes. C’est là où j’ai appris à discipliner mon corps, où j’ai arrêté le haschich : grâce à ces jeunes, j’ai appris la fraternité ; car en fait le problème de la drogue c’est un problème de manque de relation, d’affection. Entourez d’affection vos jeunes drogués mais aussi soyez fermes en disant stop ! n’hésitez pas à jeter dehors des jeunes obstinés dans la drogue, en leur disant : la porte te sera toujours ouverte, mais quand tu auras coupé avec ce machin-là. Il faut à la fois la fermeté et la douceur. Là j’ai trouvé cette douceur familiale. Une fois où on a repris du haschich, on s’est retrouvés écroulés comme des débiles, on a compris que ça nous coupait de la communication entre nous.
Et donc je cherche Dieu, je me mets à traduire en italien un dictionnaire des symboles. Et je veux les aider financièrement, alors je cherche du travail « au black ». Dans le centre de l’Italie il y avait encore beaucoup de culture du tabac. J’achète aux puces une pile de vêtements de travail, un gros sac à dos militaire pour mettre mes vêtements d’un côté, et de l’autre côté tous mes bouquins. Voyez, il ne faut pas dédaigner chez les autres cette soif de connaissances, même s’il faut sortir du flou que le diable entretient, et faire la part du bien et du mal. J’arrive en Ombrie, près d’Assise ; premier soir je ne trouve rien. Je me planque dans une serre, il se met à pleuvoir, je me la joue au fils prodigue : dans la maison de ton père il y a tout ce qu’il faut, et toi tu es là… Et tout d’un coup mon père me parle. Je ne sais pas que c’est Dieu, et je n’en veux pas de Dieu, puisque je sors du marxisme, mais la voix de Dieu me dit : « ne pleure jamais sur toi-même ». La Parole de Dieu est toujours créatrice, c’est une parole puissante, et donc cette voix me calme. Je me couche, et le lendemain il fait beau, je marche sur la route, je cherche un endroit, et tout d’un coup j’entends la même voix : « si tu veux vraiment trouver du travail, alors va là-bas ». Cette voix me tire vers un four à tabac ; j’arrive au moment même où arrive le propriétaire, qui cherchait quelqu’un pour travailler ; il me charge sur son tricycle, on arrive près d’une maison, très jolie maison. Il me regarde et dit : « je ne te connais pas mais tu as une bonne tête. Tu commences demain matin à 6h. Pendant que tu travailles pour moi je te prête cette maison. » En montant les marches, je me demande, comment ça se fait que je trouve une maison, un travail, et de nouveau la voix me dit : « tu vois, Daniel, ça c’est la providence de Dieu ». Providence, je ne sais pas ce que ça veut dire, et Dieu, je ne connais pas. Mais je suis un littéraire – parfois ça sert ! – et je comprends que providence signifie « pourvoir » ; donc il y a un Dieu qui pourvoit, qui existe et qui pourvoit à mes besoins. J’ouvre le frigo, il y avait des tranches de jambon ; je vais voir le lit, le lit était fait… Et je commence le boulot, je me régale quand mon patron m’invite chez lui, le soir il me prête sa voiture pour que je rentre chez moi me faire mes pâtes préférées… Mais là il se passe un truc. Je me mets à genoux et je veux remercier ce Dieu que je ne connais pas, je ne sais pas qui c’est, mais qui me donne un boulot et une maison. Comment je vais l’appeler ? Il y a un nom qui m’est soufflé :« Éternel » ; depuis toujours et pour toujours. Alors je le remercie, et puis je vais chercher le sens de ce mot « éternel » dans tous ces bouquins que j’avais ; et au milieu de ces bouquins, il y avait… une bible qu’un prêtre, un jésuite, m’avait donnée. J’étais allé le voir pour qu’il m’aide à trouver du boulot, il n’avait pas pu m’aider, mais il m’avait donné cette bible, que j’avais gardée. J’ai fait la première ouverture charismatique de ma vie, et je lis : « Je suis le chemin, la vérité et la vie ». Explosion nucléaire, je suis azimuté ! Je me lève, je suis chrétien ; je ne sais pas ce qui se passe, comme si ma conscience avait été retournée, cette parole a explosé en moi : c’est dangereux la bible ! Offrez des bibles ! Peut-être qu’elle va rester là pendant longtemps, et puis un jour le Saint Esprit la fera ouvrir… à la bonne page.
Le dimanche suivant, je suis allé à la messe, la messe la plus ringarde qu’on puisse imaginer, le prêtre qui croyait à peine à ce qu’il disait, cinq petites vieilles, les gens qui arrivent en retard… la plus belle messe de ma vie. Parce que là je découvrais « Éternel », et je comprenais qu’il est le chemin, la vérité, la vie. J’ai récapitulé ce que j’avais vécu dans mon enfance, mais ça ne suffisait pas encore. Il me fallait encore autre chose. Je revenais à Rome où je donnais des cours de français, (ça a duré trois ans cette histoire) toujours pour aider mes amis calabrais, et j’avais une de mes élèves qui était astrologue, anticléricale à fond. Un jour je lui dis : je voudrais faire une expérience mystique chez des moines. Je ne sais même pas pourquoi je disais ça ; c’est une façon dont parle l’Esprit Saint. Ça me sortait du cœur comme ça, je ne savais même pas moi-même pourquoi je disais ça ; il y a comme un débordement du cœur qui veut se faire entendre. Et elle me trouve l’adresse… du couvent de Saint François à Assise ! Alors j’arrive là-bas, et pensant que je venais faire une retraite vocationnelle, le responsable des vocations m’accueille dans ma chambre, et je pose devant lui mes bagages, tarots, magie, astrologie,… et au fur à mesure que je les sors ses yeux s’agrandissent ! Il me dit : « c’est quoi tous ces bouquins ? – Pourquoi, ils ne sont pas bons ? – Non, non ; si tu veux faire une semaine chez nous, tu peux, mais tu laisses de côté les bouquins. »
Il s’est passé trois choses là bas ; la première c’est que j’ai découvert le Seigneur de saint François d’Assise ; un chrétien joyeux, un chrétien tout en couleurs ! La basilique est d’une beauté inouïe, c’est la beauté de Dieu qui descend sur la terre. Deuxième chose, je pensais trouver des moinillons en train de prier comme ça, avec des toiles d’araignée tout autour, et des airs bien tristes, et je trouve des jeunes normaux, ils ont mon âge, entre 20 et 30 ans, ils se font des blagues, des farces, ils s’engueulent, ils se réconcilient, ils travaillent, ou pas, bref, ils sont normaux, et ils sont heureux ! Ça, ça me flashe. Le 3e truc qui se passe, c’est qu’un jour le recteur célèbre la messe, et j’ai trois pensées qui m’arrivent : 7 ans, 12 ans, 15 ans ; et là je me rappelle ces trois appels vocationnels que j’avais complètement enfouis à l’intérieur de moi. On a une capacité d’oubli, c’est terrifiant.
On ne transmet pas la foi, mais la possibilité pour chacun de rencontrer Dieu, pour que la personne concernée puisse passer de ta foi à toi à sa foi à elle. Et là, cela m’est revenu. J’ai demandé à rester un peu plus ; le responsable m’a demandé de lui raconter mon histoire, et je la lui ai racontée comme je vous la raconte maintenant. Il en conclut que Dieu a bien passé dans ma vie mais me demande de revenir dans deux mois. Entre temps je trouve du boulot à Rome dans un parking nocturne. Quand je reviens au bout de deux mois, c’est vraiment ça que je veux ; je demande à rester, mais il sait que je suis toujours recherché par la police en France, que je n’ai toujours pas de permis de séjour ni de travail, donc je suis un peu encombrant quand même ! Il me propose d’en reparler dans quelques mois, et en septembre je rentre comme postulant à Assise. Tous les supérieurs savent ce qu’il en est ; ils n’ont pas besoin de moi (en 78, les séminaires sont pleins) et ils m’accueillent. C’est vraiment guidé par Dieu. Je me suis posé la question d’aller payer ma dette ; mais on me dit : « tu vas payer quoi ? Tu vas rester 4 ans en prison, tu vas sortir pire qu’avant, ici tu es à l’abri du mal. Fais ton choix », et mon choix ça a été de rester à Assise. Et je pense encore aujourd’hui que j’ai bien fait. Aujourd’hui je ferais un choix différent, mais à l’époque je n’étais pas prêt, je n’avais pas la maturité, la solidité intérieure pour aller 4 ans en taule et en ressortir indemne. C’était un chemin de Dieu. J’ai fini mes études. Après 10 ans, il y a prescription, mes affaires se sont réglées ; j’ai aussi réglé mes affaires avec le service militaire, parce que ceux-là, ils ne te lâchent jamais, mais quand je suis allé régler ça on m’a dit que j’étais trop vieux.
Au passage, je dis quand même une chose : pendant ces 10 ans de clandestinité, mes parents sont venus me voir trente fois, clandestinement, partout où j’étais. C’était 5 jours de bonheur, et des heures de larmes quand ils repartaient, et je bénis leur courage, leur patience. On est parent jusqu’au bout, alors tenez bon, tenez bon : Dieu agit ! C’est aussi pour ça que je vous raconte cette histoire, pour voir la puissance de l’intercession. C’est un des charismes, l’intercession ; ce n’est pas naturel – si on est au niveau de la plainte, de la quête, c’est naturel ; mais si on intercède en sachant que Dieu agit, cela devient un charisme. Il faut que vous intercédiez en sachant que Dieu va agir, en proclamant : Seigneur, je sais que tu es à l’oeuvre ! C’est un charisme prophétique, il faut que vous le pratiquiez. Quand je prie pour une personne, que je lui apprends aussi à prier, et qu’une demi-seconde après la fin de la prière elle me dit encore : « vous savez, mon père, c’est vraiment dur », je me dis que j’ai perdu mon temps ! Nous aimons nous plaindre, et le démon nous impacte à travers nos émotions. Mais Dieu nous impacte à partir de sa parole, quand nous prions, nous ne nous appuyons ni sur nos sentiments, ni sur notre volonté, ni même sur notre foi : appuyons-nous sur la parole de Dieu, appuyons-nous sur Dieu.
Je demande à être envoyé dans un pays lointain parce que j’ai envie d’aventure. Mon supérieur m’envoie… en France ! L’Église, c’est un peu comme l’armée ! J’arrive à Narbonne, en 1994 ; je fais partie des frères mineurs conventuels (autrefois on les appelait les cordeliers, ils ont été décimés par la Révolution française). J’arrive avec ma peinture fraîche, mes 3 ans de prêtrise, et avec d’autres jeunes frères on reçoit des personnes qui ont des problèmes pas seulement psychologiques, on sent qu’il y a des présences démoniaques ; or il n’y a pas d’exorciste sur le diocèse. L’évêque de Carcassonne nous fait confiance et nous permet de faire le grand exorcisme, mais à la condition de ne pas toucher les personnes. Alors je découvre deux choses : je découvre l’ampleur du combat spirituel. Je viens de faire 7 ans d’études, et on ne m’a jamais dit que le diable existe vraiment. Et je n’ai pas étudié chez des gauchistes, j’ai étudié à Rome. Mais on est dans un temps où la théologie est très intellectuelle ; on ne nous apprend pas à être des apôtres, on nous apprend à être des pasteurs. Oui, on en parle, mais le diable, c’est le Mal, c’est la drogue, c’est le divorce, c’est tout ce que tu veux. Mais non, le diable, c’est une personne, agissante, néfaste. Dans le grand exorcisme on lui parle et il répond ; un jour il m’a dit : j’aurai ta peau… Et la deuxième chose que j’ai apprise, c’est les charismes.2
1°La première partie de ce témoignage a été donnée à la veillée du mercredi soir, la deuxième partie le jeudi au début de l’enseignement du jeudi après-midi.
2°Ce témoignage servait d’introduction à l’enseignement du p. Daniel-Marie sur les charismes.
quelle bonne idée cette transcription permettant de reprendre, je pense particulièrement aux personnes qui ont du mal à noter… Je suis bergère d’un groupe prière, les membres de notre groupe sont vieillissant mais grâce à tout ce beau travail, nous avons fais le choix de visionner pour tout le groupe tous les enseignements gentiment mis à la disposition de tous – Nous n’avons pas tous la possibilité ni financière ni pratique de participer aux sessions et votre mise à disposition de toutes ces vidéos permettent au plus grand nombre d’en goûter les fruits de l’Esprit Saint qui a n’en pas douter a largement soufflé sur vos assemblées – MERCI du plus profond du coeur !!!
Merci pour ces encouragements, Chantal ! Soyez bénie en votre mission ! Bien fraternellement. François Lebon, pôle communication FP