L’effusion de l’Esprit, bénédiction du Père

Dove in the air over cloudy sky concept of religion and peace

L’effusion de l’Esprit, une bénédiction qui vient du Père, par le Christ.

(Par Mgr Joseph Boishu, évêque émérite, in “Pentecôte aujourd’hui n° 35)

Parmi les personnes de la Trinité, le Père n’est pas celui avec lequel nous avons nécessairement la relation la plus aisée. Il nous a bénis dans le Christ”, dit Paul. Mais quelle est cette bénédiction qui vient du Père ? Cet article nous permet de réfléchir sur la façon dont le Père bénit, en particulier à travers l’effusion de l’Esprit.

«Levant les mains, Jésus bénit ses disciples. Or, comme il les bénissait, il se sépara d’eux et fut emporté au ciel » (Lc 24, 50-51). Le dernier geste de Jésus pour ses disciples est un geste de bénédiction. Au début de l’évangile de Luc, le prêtre Zacharie, devenu muet, n’avait pu donner la bénédiction en sortant du sanctuaire. C’est Jésus désormais qui la donne pour que tout homme ait la vie en abondance. Car bénir, c’est dire et communiquer la vie (cf. Dt 30, 19).

Le contexte nous invite à voir dans cette bénédiction du Christ, le don de l’Esprit Saint « qui donne la vie » comme dit le Credo. En effet, Jésus vient de déclarer : « Moi, je vais envoyer sur vous ce que mon Père a promis. Pour vous, demeurez dans la ville jusqu’à ce que vous soyez, d’en haut, revêtus de puissance » (Lc 24, 49). Cette bénédiction a donc son origine dans la promesse du Père qui donne l’Esprit par le Christ glorifié. N’est-ce pas ce dont nous faisons l’expérience dans l’effusion de l’Esprit Saint ? A condition de ne pas réduire l’effusion à la réception des charismes. Car l’Esprit est d’abord donné pour faire accéder au mystère du Père.

« Béni soit le Dieu et Père qui nous a bénis en Christ » (Eph 1, 3)

La lettre aux Ephésiens vient expliciter ce merveilleux dessein de l’amour du Père. Celui-ci se déploie « dans le Christ », c’est en lui qu’il nous a bénis, choisis, prédestinés, comblés, délivrés.… C’est encore en lui que nous avons entendu la Parole et que nous avons cru… Relisons cette page. Cette longue et si belle énumération culmine dans le don de l’Esprit. « En lui encore, vous avez été marqués du sceau de l’Esprit promis, l’Esprit Saint acompte de notre héritage. ». Serait-ce que l’Esprit est un don parmi d’autres ? Une grâce parmi d’autres ? Non car, dès le début, l’Esprit est là : « Il nous a bénis de toutes bénédictions spirituelles dans les cieux, en Christ » (v. 3). Paul rejoint ainsi l’Evangile : parce que Jésus est conçu de l’Esprit et envoyé en mission par l’Esprit, toute l’œuvre de salut du Christ est aussi œuvre de l’Esprit. Et cette œuvre s’achève dans le don de Pentecôte, réalisation de la Promesse du Père, sa bénédiction.

Ainsi Paul essaie-t-il de nous faire pressentir « quels trésors de gloire renferme l’héritage du Père parmi les Saints » (Eph 1, 8). Cette gloire qui transparaît sur le visage du Christ et qui est destinée à tous, est bien la gloire du Père. Et cette gloire qui est en définitive l’Esprit Saint lui-même, est l’héritage que le Père donne aux hommes. Non pas qu’il le donne parce que nous serions déjà ses enfants comme cela se passe entre humains. Au contraire, c’est parce que le Père nous fait héritiers de son Esprit que nous devenons ses enfants. Nous sommes vraiment des héritiers et cet héritage est gratuit. C’est ainsi qu’il nous bénit. On comprend alors comment Paul, déployant ainsi les richesses surabondantes de la gloire du Père, finit par tomber à genoux pour l’invoquer en faveur de ses correspondants afin que, connaissant l’amour du Christ, ils soient introduits dans « la largeur, la hauteur, la profondeur… » et qu’ils soient « comblés jusqu’à recevoir toute la Plénitude de Dieu » (Eph 3, 18-19). Cette plénitude est révélation du Père.

Aller jusqu’au bout de l’initiation chrétienne. 

Quand nous préparons des frères et sœurs à l’effusion de l’Esprit, les aidons-nous à aller jusqu’au bout de la démarche ? Nous efforçons-nous de leur découvrir les profondeurs du mystère du salut ?

La grâce de l’effusion donne de trouver ou de retrouver la présence vivante du Christ et d’accueillir les charismes de l’Esprit. Cette présence du Christ est perçue dans sa Parole, dans les sacrements, dans la prière et dans les frères. Et souvent le désir de partager cette bonne nouvelle germe et grandit dans les cœurs; mais il semblerait que le mystère du Père reste souvent dans l’ombre, comme si la grâce reçue n’avait pas encore déployé toutes ses virtualités. On oublie que l’effusion de l’Esprit est une bénédiction qui vient du Père et qui de soi doit nous amener à découvrir le mystère du Père.

Car que nous révèle le Christ sinon «la Plénitude de Dieu », c’est-à-dire les profondeurs du cœur du Père, lui qui est au principe et à la fin de toutes choses ? Mais comment comprendre cette difficulté à entrer dans ces profondeurs ? 

Peut être parce qu’une guérison intérieure est souvent nécessaire . L’homme est blessé, particulièrement dans la relation à son père ou à sa mère ; et cette blessure est obstacle pour dire en vérité « notre Père». La guérison est alors nécessaire et doit viser l’être de chacun et son histoire.

Pâques dans nos vies, se laisser évangéliser en profondeur

Guérison ? Oui. Mieux, « évangélisation des profondeurs ». Car reste souvent le désir d’une guérison plus ou moins magique qui se ferait rapidement et sans douleur. Nous avons un tel désir du paradis terrestre ! Un tel désir de vivre sans avoir de conversions à vivre et de passages à faire. Le travail de guérison authentique ne va pas sans consentir à la perte de ce paradis terrestre. Rappelons-nous l’écharde de Paul: « Ma grâce te suffit ! Ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse » (2 Co 12, 9).

Cette « évangélisation des profondeurs » est d’ordre pascal. C’est en consentant à la Pâque du Christ dans nos vies que nous pouvons accueillir l’Evangile aux profondeurs de notre être. Même quand il faut recourir à un psychothérapeute, on ne peut faire l’économie de la Croix. Celle-ci nous donne de nous réconcilier avec nous-mêmes, de consentir à notre faiblesse et, par là, de recevoir la paix et la joie de celui qui se sait aimé « au delà de ce qu’on peut demander ou concevoir » (Eph 3, 20).

Vie filiale et fraternelle

Cette évangélisation en profondeur doit aussi se faire, si je puis dire, en largeur ! C’est-à-dire viser aussi la relation aux autres. La découverte du Père et l’accueil de sa bénédiction ne vont pas sans un consentement profond à la vie fraternelle. « Il à voulu à partir du Juif et du païen, créer en lui un seul homme nouveau, en établissant la paix, et les réconcilier avec Dieu tous les deux en un seul corps au moyen de la croix ; en sa personne, il a tué la haine » (Eph 2, 15-16).

Combien avons- nous à être attentifs dans les groupes de prière à appeler et à promouvoir cette authentique vie fraternelle qui manifeste la bénédiction du Père.

Et pour nourrir cette bénédiction, le pain eucharistique nous est donné. Par notre tradition spirituelle, nous sommes très attentifs à la présence du Christ dans l’Eucharistie. Le Renouveau nous a permis d’y redécouvrir le rôle de l’Esprit. Mais avons-nous suffisamment perçu la place du Père ? C’est lui qui donne le Pain. C’est en sa présence paternelle que se déroule ce repas et c’est à lui que s’adresse la louange eucharistique.

A la fin de la messe, le prêtre bénit l’assemblée. Ce geste est trop souvent vécu de manière distraite. Ne pourrait-on pas lui redonner toute sa plénitude de sens ? 

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